L’art rigoureux des bric-à-brac universels

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Les Britanniques aiment le patchwork et les espaces paradoxaux. Ils aiment les listes, les Top Ten, les classements, mais ce qu’ils aiment encore plus, c’est l’art de classer les classements, de « mettre ensemble », dans des espaces fermés, des séries de choses méticuleusement répertoriés. Puis de mettre en série les séries, et de jouer comme ça, infiniment, sur des regroupements et des subdivisions.

les Britanniques ont des habitudes culturelles qui déroutent le voyageur intranquille, et qui le réjouissent plus que tout au monde. Leurs musées sont parfois d’immenses lieux ultra ordonnés, qui traitent d’un peu de tout, sans qu’on comprenne jamais dans quelle optique les choses suivent cet ordre plutôt qu’un autre.

A Belfast, le grand musée de la ville était fermé depuis trois ans, pour restauration, et j’attendais depuis un an son ouverture, car ici, l’hiver est long, humide au dehors mais sec à l’intérieur. L’ Ulster Museum vient enfin d’ouvrir ses portes, et c’est un formidable bric à brac. On y voit une exposition de peinture abstraite, des animaux empaillés, des info sur la création des étoiles, des céramiques chinoises, des artefacts industriels, des vestiges archéologiques, une histoire de l’Irlande du nord, des choses rapportées de lointaines expéditions, et encore mille autres trésors.

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J’avais déjà été frappé, à Liverpool, par le World Museum qui mettait un peu de tout à la portée du public, sans exhaustivité, sans véritable esprit de système, mais avec un profond souci de plaire et de captiver les familles.

C’est ainsi que les Britanniques sont de grands éditeurs de ces livres typiques, incompréhensibles, d’une drôlerie infinie : les « Miscellannées ». J’en ai vu quelques uns du 19ème siècle à la bibliothèque de l’université, et c’est un genre qui revient à la mode ces temps-ci, semble-t-il. Il s’agit de compiler des articles et des informations sur tout et n’importe quoi, sans discrimination a priori, sans hiérarchie. Un chapitre sur l’histoire de l’édition, suivi par quelques pages sur les noms des papes, puis des pages de listes : listes de villes du monde, listes de ceci, liste de cela, ces livres sont proprement imprévisibles.

Mon ami Patrick, à qui je me suis ouvert de cette idiosyncrasie culturelle, m’a expliqué que l’Angleterre avait été un empire et que, de ce fait, les Britanniques aimaient exposer des choses du monde entier. Patrick voit dans ces musées et ces livres, non un motif d’amusement ou d’admiration, mais le signe d’un intérêt soutenu pour le monde entier.

C’est vrai qu’on sort de ce musée, l’Ulster Museum, avec l’impression d’avoir fait une longue promenade, mais on ne sait où. Une promenade dans des univers très séparés, très variés ; on est passé d’un monde à l’autre sans préparation, et cela crée un véritable sentiment de plaisir mêlé à de la destabilisation. Car même dans les musées d’art, les musées clairement définis, les salles obéissent à une espèce de loi d’autonomie, en vertu de laquelle les espaces tranchent radicalement les uns sur les autres.

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Ici, à Belfast, le visiteur est baladé, après quoi il est comme rejeté, projeté dans le très beau Jardin botanique, l’esprit plein d’une impression confuse, entre émerveillement et perplexité. Si cela ne contente pas le désir de voyager, qu’est-ce qui le fera ?

47 commentaires sur “L’art rigoureux des bric-à-brac universels

  1. Je suis étonné qu’un esprit aussi perspicace que le tient n’ai pas relevé le parallélisme frappant entre l’éclectisme des collection et celui de l’architecture, où l’on glisse d’un style néoclassique à un style ultramoderne sans rupture, comme si le bâtiment avait toujours été ainsi. C’est très beau, je trouve.

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  2. Et c’est l’année Darwin !!! j’ajouterai que les British ont des musées beaucoup plus vivants que les nôtres, souvent compassés, ou ennuyeux, même lorsqu’il s’agit d’art contemporain qui sait être bruyant et sans humour. Et aussi que je suis contente de voir que Griffin a été remplacé par une image beaucoup plus sympa sur votre blog, ouf… j’avais hâte de voir une nouvelle mise à jour. Thanks

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  3. Je n’avais pas remarqué ce parallèlisme, Mart, j’ai juste mis deux photos qui le soulignent. Moi aussi, je trouve ça assez réussi, car au fond, aucun des deux cotés du bâtiment n’est vraiment beau, ou original par lui-même. Leur assemblage les sauve grandement.
    C’est vrai Nénette que les musées britanniques sont vivants, pas meilleurs que les nôtres, mais moins tournés vers la conservation et davantage vers l’accueil, l’animation et le divertissement actif du public.

    J’ajoute que je parlerai plus tard de l’Ulster Museum plus en détail, car la rapide visite que j’y ai effectué a déjà mis en lumière des points assez polémiques…

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  4. « Je suis étonné qu’un esprit aussi perspicace que le tient n’ai  »
    Pour être honnête, je trouve cette formule stupide et parfaitement hypocrite : on flatte son interlocuteur pour mieux lui reprocher quelque chose. Je n’avais jamais utilisé ce genre de formule rhétorique et avais envie d’essayer au moins une fois.

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  5. On a tous des formules comme ça, qui font de l’expression de notre pensée, au choix, soit un « patchwork des espaces paradoxaux », soit nous enferment dans la circularité de la pensée qui pense le monde à paritir de ses lieux communs personnels, si on peut dire.

     » la rapide visite que j’y ai effectué a déjà mis en lumière des points assez polémiques…  »

    Accord des participes passés ?

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  6. Merci Ben, mais Mart s’est déjà enfermé dans la circularité de l’ennui sur son blog. Il préfère mettre la dernière main à son roman qui s’annonce, je dois le dire, de plus en plus mieux (correction grammaticale ? de plus en plus meilleur ? de plus en plus super ?)

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  7. Quelles question, Nénette ? Moi je suis à fond pour que ce blog se féminise à fond. En Chine, ma grande fierté était d’avoir des lecteurs et commentateurs chinois et étrangers, « pro-chinois » et « sino-critiques ». Grande fierté.
    Je suis peu lu, apparemment, par les Anglo-Saxons, qui lisent peut-être moins les langues étrangères que les Chinois, mais les femmes francophones, nom de nom, je les accueille les bras gand(s) ouverts.

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  8.  »Bon, Nénette on sait que c’est François, mais vanessa j’ai un doute. »

    Il est en baisse de regime le Mart en ce moment…hahhaha haha ! c’est l’effet  »infamie de la charite » qui lui fait faire des hallucinations -j’espere pas collectives sur ce blog- !
    A+

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  9. Nénette c’est François, non mais on croit rêver. Mart, crois-tu aussi que c’est François qui tient le blog de Nénette, qu’il intitule « La fille de soie » pour faire diversion ?
    Vanessa en revanche, je la connais personnellement, et je peux témoigner, avec des autorités morales comme Ben, sa femme, son frère et ses soeurs, de son existence matérielle, spirituelle, artistique, enfin individuée.

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  10. Hier soir, j’étais tellement étonnée de la supposition de Mart : Nénette c’est François que je n’ai pas su que répondre. Non, je ne suis pas François. Et je ne connais directement personne (directement = je l’ai vu de mes yeux vu), c’est comme l’histoire de l’homme qui a vu l’ours… sur ce blog. Mais le langage nous réunit. Je sais que Guillaume est un ami de MJ que j’ai rencontré une fois dans le cadre de « Coudre sa vie à un bouton » (La Mercerie). Quand à « penser » que je suis un homme… ??? je suis une grand mère de Lyon. Ca vous va, comme ça ?
    Et pour Ben : Vanessa pense que les femmes ne pensent pas Lol

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  11. et merci Guillaume d’attester une nouvelle fois (décidément, je finirai par douter, moi aussi) de mon existence ‘matérielle, spirituelle, artistique, enfin individuée.’
    c’est cool

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  12. Désolé les filles (ça aussi, c’est une expression naze). Il m’arrive de penser parfois que, si on invitait tous les participants à ce blog autour d’une table, il n’y aurait que François. Mais c’est un simple cauchemar.

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  13. Ah ah ah! Ca c’est drôle Mart.
    Apparemment pas très sympa pour François, mais en réalité un véritable hommage à son travail de gentil terroriste des cyberespaces, de situationniste détournateur, d’épuiseur de fonctions et d’identités.

    Vanessa, toi dont on doute tant, tu es ma soeur. Reste avec nous, ton existence oscillante nous est précieuse.

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  14.  »Apparemment pas très sympa pour François, mais en réalité un véritable hommage à son travail de gentil terroriste des cyberespaces, de situationniste détournateur, d’épuiseur de fonctions et d’identités. » Merci Guillaume ca fait plaisir de voir -enfin !- reconnaitre ce travail de commentateur a sa juste valeur !

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  15. pourtant, j’avais bien pris garde de ne pas mettre une photo aguichante, elle était plutôt dissuasive même…
    Nénette a raison, c’est un blog d’homme ici (à moins que ce ne fut Laurence?)

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  16. « BAWWWWAAAAJJJD ? » wagrouifgdte ? WAAAAAHHHHHIOOOUUUAHHHHGROUIF !GRAOUIDGWARFJEANROLLINWARF ! WOUFWOUFWARF

    (trad : « pourtant, j’avais bien pris garde de ne pas mettre une photo aguichante, elle était plutôt dissuasive même… »c’est une plaisanterie j’espére trés chére ?
    Allez arrete tes blagues coquine je sais que tu aimes les gros calins dans n’importe quel lieu et n’importe quelle tenue ! » ouais c’est un blog d’hommes ici, d’homme chien même ! AHAHAHWOUF !)

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  17. chewbacca, sort tes pattes de là!

    ‘Vanessa, toi dont on doute tant, tu es ma soeur. Reste avec nous, ton existence oscillante nous est précieuse. ‘
    gaffe, Guillaume, mon frère est jaloux (limite corse)…

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  18. A propos de listes: umberto eco:
    « […] il publie prochainement Vertige de la liste, un livre très richement illustré qui recense toutes sortes de listes artistiques, en peinture comme en littérature, de Brueghel à Warhol, de Homère à Georges Perec. A cette occasion, Umberto Eco sera, en novembre, l’invité du Louvre (1), où il a conçu un vaste programme – conférences, expositions, concerts, films – autour de ce thème.[…] »

    http://www.louvre.fr/llv/auditorium/detail_theme.jsp?CONTENT%3C%3Ecnt_id=10134198674149127&CURRENT_LLV_FICHE%3C%3Ecnt_id=10134198674149127&FOLDER%3C%3Efolder_id=9852723696500855

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  19. J’ai ôté un certain nombre de commentaires sur ce billet, où François s’était lâché, et si ça se trouve il n’était pas seul.
    Ce qui est sûr, c’est qu’il y a eu des lecteurs et commentateurs qui m’ont écrit personnellement pour exprimer leur mécontentement en ayant vu leur pseudonyme pour des commentaires qu’ils n’avaient pas écrits.
    Je leur présente mes excuses pour ces inélégants procédés, et continuerai d’effacer quand il le faudra.

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  20. « il y a eu des lecteurs et commentateurs qui m’ont écrit personnellement pour exprimer leur mécontentement »

    « Laurence est une femme qui en a » : elle manque aussi un peu d’humour, non ?

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  21. « Je leur présente mes excuses pour ces inélégants procédés, et continuerai d’effacer quand il le faudra.  »
    Et bien il n’y a qu’a voir le com de Mart ci dessus pour se rendre compte que je suis parfaitement innocent dans ces histoires « d’inélégants procédés ». Je suis véritablement choqué que l’on puisse me confondre avec cette infamie. c’est trop injuste, je ne parlerai jamais a une inconnue -qui plus « virtuelle » rencontrée sur le net- de cette maniére.
    « où François s’était lâché, et si ça se trouve il n’était pas seul. » EVIDEMMENT QUE JE N’etais pas seul ! ce que je déplore c’est quand meme le manque de recul car beaucoup de mes coms ou « je me lache » étaient ironiques….

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  22. François, tu parles d’infamie et d’ironie, mais tu lui as quand même vanté ton coulis, et ça tu reconnaitras que ce n’était quand même pas très élégant. Si j’étais elle, je me sentirais quand même un peu offensée.

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  23. François et François, aujourd’hui, c’est le jour des morts, vous auriez pas une tombe d’arrière-grand’mère à aller fleurir, quelque part loin en province ? Laissez-nous reposer en paix.

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