Il m’avait téléphoné un matin où je n’étais pas d’humeur. Il voulait visiter la chambre que j’avais mise sur le marché. Il m’attendrait devant l’église méthodiste, sur Donegal road.
Moi, je pensais donner la chambre à un jeune du coin, un protestant extrêmement sympathique, qui ne voulait pas entendre d’une coalition de gauche pour son pays, mais qui savait où se situait la Swatt Valley au Pakistan et qui connaissait des joueurs de l’Olympique lyonnais. Un mec de droite qui travaillait de nuit dans des boulots sans intérêt pour lui.
Une fille avait envie de vivre dans ma maison, aussi. Une fille très charmante, mais qui avait un chien et qui voulait qu’on la débarrasse de tous les meubles de la chambre pour qu’elle puisse y mettre les siens. Trop d’emmerdements en perspective, je préférais le jeune du coin, fût-il conservateur et difficile à entendre par moments.
Bref, je vais à l’église méthodiste, et je vois un jeune homme avec une valise et un sac à dos. Il visite la chambre et il me demande de signer le contrat. Il n’y a pas de contrat, ici, lui dis-je. Ici, c’est de la main à la main, top là et à la revoyure.
Je regarde son bagage, je contemple sa motivation tranquille, sa modeste assurance, et je lui dis d’accord, top là. Cela fait trop longtemps que je perds de l’argent avec cette chambre vide, je ne vais pas laisser l’occasion de remplir en un instant ladite chambre et mon portefeuille.
C. vient de Riga, en Lettonie, et il a traversé l’Europe de la Baltique avant de s’envoler pour l’Irlande du nord. A à peine vingt ans, il a déjà gagné sa vie en travaillant dans des usines en Suède, des bureaux au Danemark, en entraînant des équipes de basket ball en Estonie. Il a besoin d’un logement à Belfast au plus vite car il compte aller travailler dès le lendemain.
Je le revois dans le salon deux ou trois jours plus tard. Il a déjà trouvé deux jobs. Le premier, il l’a quitté au bout de deux jours, et le deuxième, sur les docks, il commence lundi.
Quelle fut sa motivation pour venir à Belfast?
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A ce qu’il m’a dit, il a regardé la carte et il s’est dit qu’il n’était jamais allé là-bas. Je ne le crois pas, mais attendons un peu, nous en serons plus sous peu. A mon avis, il connaît des gens qui lui ont dit qu’on pouvait trouver du boulot facilement en Irlande du nord. Ce qui est vrai, puisque le secteur publique est énorme et le taux de chômage très élevé, ce qui signifie que les employeurs ont besoin d’une main d’oeuvre d’étrangers précaires.
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Une conjoncture pleine de promesses, en effet.
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