Précarité des administrations consulaires

J’ai eu l’occasion d’observer d’assez près comment pouvait fonctionner un consulat, quand je travaillais à l’université chinoise. Il n’y a rien de tel pour faire émerger des réflexion politiques et sociologiques. Comment le pouvoir est dilué, comment les choses sont gérées, comment des projets naissent, comment ils grandissent et comment ils meurent.

Dans une ville comme Shanghai, il y a un consul général, sous les ordres de je ne sais qui, peut-être l’ambassadeur.

Sous les ordres du consul, quelques attachés, à l’économie, à la culture, à la coopération universitaire, etc.

Sous les ordres de chaque attaché, quelques chefs de mission.

Sous la responsabilité des chefs de mission, des stagiaires non payés qui font un travail considérable (non, je n’ai pas dit que ce sont eux qui travaillent le plus, car je n’en sais rien.)

Par définition, le personnel consulaire est temporaire, les cadres restent quelques années et doivent laisser leur place. Dans ce que j’ai vu, les équipes qui se succèdent prennent un grand soin à laisser pourrir les projets mis en place par leurs prédécesseurs. Et le moment venu, leur porter un coup fatal.

Inversement, les équipes arrivantes aiment lancer de nouveaux projets qu’ils pensent meilleurs que les précédents, et dans la plupart des cas, les individus qui les mettent en oeuvre ne seront pas là pour voir s’ils aboutissent vraiment, ni pour en faire un vrai bilan.

En quatre ans, j’ai vu la valse des diplomates, des gens arriver, des gens partir, des programmes s’évanouir sans raison apparente, d’autres émerger sans réelle nécessité.

J’ai dû m’investir dans l’un d’eux, j’étais payé pour cela. Un programme intéressant, avec des étudiants passionnants, qui sont devenus des amis. Mais un programme sans objectifs précis, un programme bricolé, en devenir, ce qui le rendait encore plus attachant. Quelque chose que l’on pouvait façonner pour lui donner tel ou tel avenir.

Puis le consul a changé, mais ça n’a pas eu de conséquence, car l’attaché était toujours là. Puis l’attaché est parti, mais la chef de mission était toujours là pour porter le projet. Puis la chef de mission est partie, alors je me suis retrouvé seul avec mes valeureux étudiants, sans objectifs et sans feuille de route claire. Nous avons travaillé à vue, avec un certain plaisir, entre passion et découragement. Tous ces gens partis, ils ont été remplacés et, un an plus tard, la nouvelle équipe a prononcé l’arrêt de mort de ce programme.

Impression d’avoir travaillé pour rien. Impression de précarité. Me sont restés les étudiants, ce qu’ils m’ont apporté et ce que je leur dois.

8 commentaires sur “Précarité des administrations consulaires

  1. Sage précaire, t’es venu trop tôt dans la saison printanière du québec;tu n’as pas eu le loisir d’apprécier la clémence du climat; par ici les saisons sont décalé; fin mai début juin t’aurais vue de splendides magnolias en fleurs dans les parcs de Montréal et de Québec aussi;

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  2. Oui, Mildred, c’est vrai que j’ai manqué les fleurs. Pauvre de moi. J’ai aussi manqué les fameuses tulipes d’Ottawa.
    Mais en même temps, si j’étais venu plus tard, j’aurais manqué les élections, et toutes les conversations éclairantes qu’elles suscitent.

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  3. Quand on parle de précarité et de consularité, on ne peut pas penser à Geoffrey Firmin, ce Consul yankee perdu dans un bled du Mexique, le héros universel de Sous le Volcan, de Malcolm Lowry.

    Sinon, moi je trouve que le titre de Consul est assez joli, très décoratif, surtout le « consul honoraire »avec un petit côté Romain, je me serais bien vu Consul, tiens, ou même Proconsul, tant qu’on y est.

    On peut s’interroger sur la fonction, en-dehors de son aspect décoratif. On voit à peu près à quoi sert un ambassadeur, mais à quoi peut bien servir un consul ? Moi, ce que j’en dis, c’est pas pour dénigrer le Consul, n’est-ce pas. Au contraire, c’est l’ambassadeur qui a perdu beaucoup de son lustre depuis une stupide campagne publicitaire pour ces boulettes à la graisse et au sucre squi font mal aux dents.

    Je crois que le Consul est une sorte de dilettante des Affaires étrangères, un peu dandy, un amateur assez désoeuvré. Il y a des Consuls honoraires un peu partout dans des trous perdus, que peuvent-ils bien faire ? Je ne sais même pas si on les paie encore. Ce sont des gens qu’on doit pouvoir oublier quelque part dans le monde pendant des décennies, ils finissent par attraper des maladies décoratives comme le palu ou la cyrrhose du foie, ils disparaissent et on n’en parle plus.

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  4. « Au contraire, c’est l’ambassadeur qui a perdu beaucoup de son lustre depuis une stupide campagne publicitaire pour ces boulettes à la graisse et au sucre squi font mal aux dents. »
    Ah ah il est marrant ce Ben…Mais moi qui ne suit ni proconsul ni ambassadeur ni rien de tout ce gratin (juste assistant-assisté universel c’est déjà pas mal…) je me fais beaucoup de soucis pour le SP en ce moment, où est-il , que fait-il ? est-ce qu’on existe encore pour lui, nous ses commentateurs habituels…? ça fait trois siécles qu’on reste kéblo sur ce billet et en plus , le dernier à disparu avec des liens qui m’interessait vachement sur la sorcellerie africaine y tout (question perso…) bon il a changé la déco ok (j’aurai opté pour un bleu marocain pour ma part question perso aussi) le beige c’est pas mal ok, mais la rien…bon, de toutes façons, j’ai trop de taffes pour le dernier mois scolaire a venir donc je ne pourrai pas suivre les aventures jusqu’au bout à fond mais quand même…pfff allez je me couche, c’est la sieste.re pfff

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