Terminer un cours de philosophie

J’ai donné mon dernier cours de philosophie hier, 1er juin 2023. Je ne suis pas en vacances car d’autres tâches m’attendent encore. Les élèves qui le veulent pourront aussi venir en classe pour réviser le programme avec moi sous forme d’exercices pratiques, d’entraînements à la dissertation et à l’explication de texte.

Mais en cette fin de semaine, le programme de la classe terminale est bouclé. Je me faisais un point d’honneur de consacrer un cours à toutes les notions prévues dans les textes officiels, même s’il est explicitement rappelé que ces notions pouvaient apparaître de manière libre, à l’intérieur d’un cours organique. J’avais remarqué que les élèves, même et surtout ceux qui manquent d’assiduité, étaient très sensibles à cette dimension programmatique de leur cours. Ils tiennent à avoir « fait » les chapitres correspondant à ce qui est annoncé dans la première page de leur manuel. Vous êtes regardé avec suspicion si vous expliquez : « Vous avez étudié l’idée de nature sans avoir fait un chapitre sur le notion de nature. Souvenez-vous, nous en avons parlé avec l’idée d' »état de nature » développée par Hobbes et Rousseau, et aussi avec Kant qui nous enseignait ce que la nature demandait à l’homme. Nous en avons beaucoup parlé dans notre cours sur le travail et celui sur la technique, rappelez-vous les textes d’Aristote, de Descartes, de Marx… » Leur regard silencieux en dit long. Non, le chapitre n’est pas fait.

En ce qui me concerne, j’aime mettre un point final à quelque chose, car je ritualise un peu ma vie. Je souligne par des actes symboliques les virages et les passages. Je crois avoir soigné la dernière page de mon livre Birkat al Mouz. Je trouvais beau que le récit se termine par le mot « concentration ». Dieu sait pourquoi. Pour moi, cela sonnait comme un coup de gong grave et solennel qui devait résonner longtemps dans l’âme du lecteur. Hier, j’ai donc conclu mon cours sur l’État et la dernière diapositive de mon document PowerPoint était une déclaration très auto-satisfaite :

Fin du programme. Merci à tous.

Cela a déclenché une salve d’applaudissements dans les trois classes que j’ai enseignées, alors même que j’avais eu le plus grand mal à faire respecter le calme dans des groupes d’élèves nombreux et dissipés par la fatigue. Les élèves, aux aussi, étaient satisfaits, même et surtout ceux qui n’avaient rien écouté.

Comment François Bégaudeau a perdu son emploi

Il y a mille manières de se retrouver au chômage et de belles perspectives associées à cette compétence que j’ai appelée en 2007 « Savoir perdre son emploi ». Je le dis à tous ceux qui souffrent du monde du travail et qui prétendent que leurs affaires tournent bien pour faire bonne figure : il ne faut pas avoir honte d’une période de chômage, cela ne dégrade pas l’idée que l’on se fait de vous.

Ni dissimulez pas les épisodes conflictuels que vous avez connus et qui vous ont valus de tomber malades, d’être harcelés, d’être traînés dans la boue par des cons. Cela arrive. Cela n’entache pas votre profil professionnel, car nous savons que derrière un employeur se cache parfois un être faible et méchant.

Prenez le cas de François Bégaudeau, écrivain et critique très puissant du monde littéraire d’aujourd’hui. Après la publication d’Histoire de ta bêtise, le magazine Transfuge l’a viré en essayant de le salir. Souvent dans les ruptures : il ne suffit pas de voir la personne s’éloigner, on veut en plus l’égratigner, justifier sa décision en soulignant des défauts de caractère rédhibitoires chez elle. Le patron de Transfuge n’y manque pas en nous informant que Bégaudeau n’a pas d’amis, qu’il n’est pas aimé dans le milieu, que c’est une tête de con.

Quelle bassesse d’âme de la part de ce Vincent Jaury. Pourquoi ne reste-t-il pas à sa place de directeur ? Son argument est perfide et surtout contre-productif car le lecteur et tout nouvel employeur peut facilement voir le verre à moitié plein : certes, Bégaudeau s’est engueulé avec d’autres gens, mais il a donné totale satisfaction pendant quinze ans ? 15 ans ? C’est énorme comme longévité dans une entreprise culturelle.

Personne, aujourd’hui, n’espère conserver un collaborateur au-delà de quelques années. À mes yeux, le fait que Bégaudeau soit allé au clash avec plusieurs employeurs et camarades, ce n’est pas le signe d’une personnalité toxique et caractérielle. Au contraire, j’y verrais plutôt la marque d’un esprit sérieux et perfectionniste, entier et libre, n’ayant aucune crainte de se retrouver sans emploi. Alors le patron Vincent Jaury, ne supportant pas cette impertinente liberté de ton, décide d’accuser Bégaudeau du plus grave des forfaits : l’antisémitisme.

Là, c’est le coup de grâce. Dans la presse parisienne, on ne se relève pas d’une accusation d’antisémitisme. Bégaudeau se défend sur son blog en affirmant que son sujet n’était évidemment pas « les juifs d’aujourd’hui », mais le fait très connu et vérifiable que les juifs français sont devenus globalement de droite, et son expression fut « l’abêtissement récent des juifs de gauche ». Il n’y a rien là d’antisémite, et le coup revient en boomerang au visage de Transfuge. Ce type d’arguments employés pour souiller des individus avait déjà été employés par Philippe Val quand il s’occupait de Charlie Hebdo et avait déjà valu une grande fuite des lecteurs.

Transfuge, n’étant déjà pas très lu, a choisi clairement son camp. Celui de la subvention gouvernementale pour survivre plutôt que la recherche d’un lectorat. L’apparition quelques ligne plus loin du nom d’Éric Naulleau confirme ce mouvement.

Quand vous faites appel à des personnages médiatiques qui ne pensent pas, qui ne proposent rien, c’est que vous êtes à court d’argument. « D’ailleurs, Eric Naulleau l’a dit », voilà qui vous discrédite pour l’éternité aux yeux des lecteurs, mais qui rassure les donneurs d’ordre. Naulleau fait partie de ces gens dont le rôle principal consiste à taper sur la gauche tout en se réclamant de gauche, pour affaiblir autant que possible toute possibilité d’alternance. Ce patron de Transfuge ne pouvait pas mieux s’y prendre pour donner de la gloire à Bégaudeau.

François Bégaudeau a donc donné une leçon de précarité. Il a su perdre son emploi avec flamboyance et en acquérant du prestige au passage. La sagesse précaire lui tire son chapeau.

La France offre un jour férié national pour fêter l’Aïd al Fitr

Pour terminer cette série sur la laïcité, qui a commencé, je le rappelle, avec une petite réflexion sur Emmanuel Kant, je propose d’organiser un référendum qui poserait aux Français la question suivante :

Voulez-vous un jour de congé supplémentaire pour que la nation reconnaissante fête avec ses frères musulmans la deuxième religion de France, à l’occasion de l’Aïd al Fitr ?

Tous les ans, à la fin du ramadan, les Français pourraient avoir un week-end prolongé grâce au vendredi qui suit l’aïd. Les écoliers et les employés du service public se réjouiraient. Les professionnels du tourisme verraient soudain d’un bon oeil cette religion musulmane qui leur permet de remplir les hôtels et les restaurants, alors qu’elle n’est présentée d’ordinaire que d’une manière négative.

Vous m’avez bien lu, je ne demande pas une loi, mais un référendum. J’aimerais voir les Français débattre sur cette idée d’un jour de congé supplémentaire et de la place joyeuse que doivent prendre les musulmans dans notre nation.

Quoique. Les arguments identitaires pleureraient sur nous comme une averse interminable. Les économistes orthodoxes expliqueraient que les Français travaillent déjà trop peu et qu’il faut au contraire augmenter les nombre d’heures au boulot pour soigner notre compétitivité. Les musulmans seraient à nouveau associés à des clichés de paresse. On les accuserait de tirer au flanc alors que tout ce qu’ils demandent est qu’on leur fiche la paix.

Non, finalement, le mieux serait une loi autoritaire, à la française, couplée à l’abrogation de la loi sur la laïcité de 2004. Le XXIe siècle sera spirituel ou ne sera pas. Les signes religieux sont de retour. Comme je l’ai déjà écrit en 2010, nous serons encouragés à accueillir les plus belles mosquées. Toutes les confessions sont invitées à célébrer dans la joie et les couleurs. Nos villes et nos villages connaîtront un âge de renaissance.

Ségolène Royal double Carole Delga sur sa gauche

J’aurais dû m’y attendre mais j’ai quand même été surpris. Ségolène Royal qui avait appelé à voter Mélenchon aux présidentielles de 2022, revient dans les médias et défend la stratégie de la Nupes en renversant complètement le discours ambiant sur les fauteurs de troubles de gauche. Quand on lui demande si LFI n’a pas un peu exagéré en faisant obstruction elle répond : « Ce n’est pas tout à fait exact. Quand il y a un cambrioleur qui vient chez vous, vous faites obstruction ! Vous fermez votre porte ! L’abaissement des droits à la retraite est vu par les Français comme un hold up. » Chapeau Royal. Si elle avait été aussi bonne en 2007, elle aurait gagné l’élection présidentielle contre Sarkozy.

Sa façon de prendre la défense de la gauche, au moment même où la gauche centriste essaie de faire son retour, est le signe d’une brillante politicienne. Alors que Carole Delga, qu’on voyait tous devenir la nouvelle égérie de la gauche modérée, se trouve enlisée dans son projet contestable d’autoroute à Toulouse, Ségolène Royal attire toute la lumière et prend la posture de la maman qui ne comprend pas que la république puisse « taper sur la tête » de ses enfants.

Elle donne dans cette interview une leçon de communication politique. Elle réussit même à imposer le silence aux journalistes pour parler de questions environnementales, de sujets sociaux, et même de points constitutionnels. Elle prend de ce fait la place qu’elle désire occuper : énarque, ministre, élue de terrain et présidentiable. Elle m’a plusieurs fois étonné, en particulier quand on elle a dit qu’il fallait retirer cette réforme des retraites « pour passer aux choses sérieuses. » Et les journalistes ne savaient que dire car en effet, notre gouvernement n’a pas su nous faire croire que c’était une mesure sérieuse. Royal a su montrer qu’un homme d’Etat devait s’occuper des choses importantes comme l’emploi, l’environnement, l’industrie, l’hôpital, l’école et la jeunesse.

Si personne n’y prend garde, c’est elle qui rassemblera la gauche et non ceux qui ont cru intelligent de s’opposer à Mélenchon. Elle a préféré s’opposer à la droite qui, en effet, perd les pédales : c’est moins bête et c’était le moment.

Théorie du soulèvement (4) brûler le printemps avec le gaz trop cher

Ma dernière facture de gaz pour les mois de mars et d’avril 2023 : 820 euros. Les mois d’hiver sont passés, nous ne chauffons plus l’appartement, et nous devrions payer plus de 400 euros par mois ? Persuadé que c’est une mystification, j’appelle mon fournisseur pour qu’il rectifie cette erreur. Hélas, c’est la triste vérité. La dame africaine qui était à l’autre bout de la ligne, payée elle aussi une misère pour m’expliquer que c’est le coût normal des choses, qu’on ne peut rien faire, que mon choc vient de la fin des aides de l’État sur les factures de gaz, cette dame doit recevoir toute la journée des appels furibards et des insultes exaspérées.

820 euros me seront débités en juin pour avoir utilisé le gaz de ville dans un appartement de 90 m2, dans lequel vivent seulement deux personnes raisonnables. Cela seul me donne envie de brûler la sous-préfecture. La femme que j’aime a pleuré de dépit et m’a dit quelque chose qui m’a bouleversé : « C’est la première fois que nous avons des problèmes d’argent depuis que nous nous connaissons. » Nous nous en sortirons, mon amour.

Oui, nous, les sages précaires, nous en sortirons car nous sommes malins et nous retournerons dans des pays étrangers.

Mais le gros de la population, surtout ceux qui ne sont pas précaires, mais qui ont une situation stable. Ce gros de la population française, petite bourgeoisie massive qui rembourse des crédits à la banque, ne va pas supporter ces nouvelles factures. Si moi, qui suis libéral et social démocrate, j’ai des pulsions de révolte, on peut imaginer les courants de colère qui vont enflammer le peuple des gilets jaunes, des abstentionnistes sourcilleux, des anti-vax jusqu’au-boutistes, des électeurs d’une gauche radicale, ou d’une extrême-droite décomplexée.

Sensation que ce printemps 2023 va être explosif.

Quand un salaire minimum entier doit être dépensé pour les factures, le transport, le loyer et les assurances, qu’il ne reste même plus rien pour manger, on sait ce qui se passe. Dans un pays où trente millions d’habitants vivent avec moins de 2000 euros par mois. Point n’est besoin d’être devin pour s’attendre à un soulèvement majeur.

1er Mai 2023 : Macron t’es foutu, le sage précaire est dans la rue

Frédéric Lordon l’a clamé dans un discours en mars 2023 : nous avons eu un long hiver mais nous avons droit à un printemps, et au printemps tout le monde le sait, il y a un mois de mai.

Nous y sommes et c’est la journée du travail. La fête des travailleurs. Les précaires eux aussi, qui n’ont pas la culture du collectif ni de l’organisation militante, écoutent leur devoir qui est de battre le pavé avec tout le peuple brutalisé par un monde du travail ignoble.

Le sage précaire n’a pas beaucoup participé aux grèves de cet hiver mais a toujours soutenu le mouvement. C’est une vieille histoire qui a souvent été racontée sur ce blog : la limite de la sagesse précaire est toujours atteinte en présence du soulèvement populaire. Aujourd’hui 1er mai, il peut au moins faire acte de présence dans les rues de sa petite ville.

J’admire tous mes collègues du lycée qui ont mouillé la chemise et ont fait grève pour lutter contre la réforme des retraites. Ils ont fait preuve de patience, de sacrifice, de solidarité, de combativité. Les gens comme moi ne pouvaient les suivre pour des raisons de précarité de leur statut. Les précaires se doivent d’agir de manière servile pour avoir une chance de signer un contrat de travail. Ils peuvent aussi claquer la porte et aller voir ailleurs, c’est leur force. Mais ils ne peuvent pas gagner un rapport de force avec la direction. La seule puissance sociale du sage précaire est d’être serein face à la perte d’emploi et de se débrouiller pour vendre sa force de travail à un prix qu’il juge acceptable.

La sagesse précaire recommande donc, en ce premier mai, la grève générale et l’insurrection du peuple.

Soulèvement général, voilà, il ne reste plus que cela à faire. Il est l’heure d’aller se servir directement.

Mes tomates poussent enfin comme des fusées

Je peux enfin me réjouir le matin. Mon jardinage commence à porter ses fruits.

Le soir je couvre les plants d’une serre bricolée avec une bâche qui avait servi à envelopper des matelas achetés d’occasion. Le matin je les découvre pour qu’ils profitent du grand air.

Quand le soleil paraît je les photographie comme des stars de cinéma. Sur le smartphone que j’utilise pour l’occasion, je sélectionne le mode « portrait » et la fonctionnalité « lumière de studio ». Cela gomme leurs rides et rend leur peau plus éclatante.

Premières mises en terre des plants de 🍅

Je sais qu’il est un peu tôt pour les mettre en terre. On me dit qu’il est préférable d’attendre le mois de mai pour éviter les derniers frimas. Je tente ma chance avec deux plants tandis que je garde les autres à l’intérieur.

Mon plan consiste à mettre en terre de manière échelonnée pour expérimenter. Le but est de produire des tomates le plus tôt possible, dès que les beaux jours seront installés.

Je vous tiendrai au courant de l’évolution de la situation.

Mise en terre 12 avril 2023

Pourquoi Michel Houellebecq nous a lâchés

Cela fait plusieurs années que l’écrivain ne me fait plus d’effet. J’ai lu ses premiers romans avec plaisir, je ne le nie pas, mais je l’ai lâché au point de ne plus avoir même le désir de lire son dernier roman, même sous forme d’un petit plaisir coupable.

Il y a dix ans déjà, sa prose ne m’impressionnait plus. Déçu par La Carte et le territoire (prix Goncourt 2010), je trouvais qu’il était allé au bout de son inspiration : il ne lui restait plus qu’à se répéter pour se faire connaître et reconnaître par ceux qui n’avaient pas encore lu. Malgré cela, Soumission (2015) m’avait relativement plu. C’était intéressant d’imaginer la possibilité d’une islamisation de la France. La vision de l’islam n’y était pas très intelligente mais d’un point de vue romanesque, le dispositif fonctionnait plutôt bien.

En revanche, Sérotonine (2019), à mes yeux, ne présentait plus rien d’intéressant. L’auteur faisait du Houellebecq. Le personnage public devenait radicalement d’extrême-droite et il devenait évident pour tous qu’il n’avait plus rien à apporter au monde.

En ce qui concerne Anéantir (2022), la stratégie commerciale mise en place par l’auteur avait de trop grosses ficelles, cela n’avait plus aucun effet sur moi. Ce que j’ai entendu et lu dans les médias sur le roman m’a suffi pour m’en faire une idée. Le truc séduit exclusivement les gens qui n’ont pas lu les premiers romans de Houellebecq et qui n’ont pas d’appétence pour la déstabilisation qu’impliquent toute forme nouvelle, toute pensée originale, toute théorie novatrice. Houellebecq a fait le même chemin que Michel Onfray et Sylvain Tesson : il s’est laissé déporter vers la droite réactionnaire comme un voilier sans gouvernail, et il vend encore ses bouquins au petit million de Français qui ont de l’argent à ne plus savoir qu’en faire.

Sans connaître les chiffres diffusés entre professionnels de l’industrie du livre, il est facile de deviner la courbe des ventes des livres de Houellebecq : ascendante de 1994 jusqu’au pic du prix Goncourt 2010. Puis un plateau dû aux émotions provoquées par son livre sur l’islamisme paru en pleine crise terroriste. Et enfin une descente qui reste soutenue grâce au public nouveau attiré par son attachement explicite à l’extrême-droite catholique.

Heureusement pour son train de vie, Houellebecq détient ce qu’il faut pour attirer le public des gens riches, le seul encore capable d’acheter des livres : une célébrité durement acquise, des idées de beauf, une pensée facile à comprendre, une image de marque, une réputation, et enfin des livres-objets de qualité pour décorer les intérieurs cossus.

Ses revenus peuvent donc être assurés pendant encore vingt à trente ans avant que son oeuvre ne sombre dans l’oubli.

Je ne boycotterai pas le mondial au Qatar

On nous dit qu’il fait trop chaud au Qatar pour jouer au football, et que les stades seront donc climatisés, ce qui est un crime contre l’environnement. Je suis allé au Qatar en octobre 2015, et à nouveau en mars 2018, il n’y fait pas trop chaud et la climatisation ne sera pas nécessaire fin novembre début décembre.

D’ailleurs, la sagesse précaire est satisfaite de la saison choisie pour l’organisation de la coupe du monde. Fin novembre, c’est le moment le plus dépressif de l’année, il fait toujours nuit, les gens sont tristes, ils ont froid, on est loin des fêtes de fin d’année. Un grand événement sportif est le bienvenu pour remonter le moral des troupes. En juin et juillet, au contraire, il fait trop chaud et les gens passent leur bac, leurs examens, veulent regarder d’autres événements sportifs, l’attention est trop sollicitée.

Mais ce n’est pas pour ça que des gens boycottent le mondial cette année.

Depuis quelques mois, de nombreux articles et émissions dénoncent le Qatar pour son mauvais traitement des ouvriers qui construisent les stades de football. Or, cela fait douze ans que le Qatar a été nommé pour organiser la coupe du monde du football. On nous dit que les ouvriers sont maltraités. Je le crois, mais pas plus que dans tous les pays chauds, et dans tous les pays froids. Les immigrés sont mal traités, malheureusement, dans de nombreux coins de cette planète.

Le Qatar est accusé de mettre en esclavage des ouvriers. Je n’y crois pas. Les ouvriers sont venus de leur propre chef dans les pays du Golfe, personne ne les a forcés. Ils y ont été poussés par la pauvreté comme les autres immigrés. Ils repartiront chez eux au bout de quelques années, comme tous les autres ouvriers des pays du Golfe, exception faite de ceux qui sont morts.

Que va-t-on faire de tous ces stades ? N’est-ce pas un gâchis épouvantable ? Oui, comme tous les jeux olympiques, les expos universelles, et toutes ces conneries. Bienvenu dans le monde du capitalisme, vous venez de découvrir que ce monde est dirigé par des dispositifs de gaspillage indécent, et de dépense somptuaire dégoûtante.

Le journal Médiapart nous informe de toutes les corruptions qui ont présidé à l’élection du Qatar pour l’organisation du Mondial. J’écoute attentivement, et j’en conclus qu’en effet ils ont graissé la patte de bien des gens à coups de millions d’euros. Ces millions viennent de leur gaz et du pétrole qu’ils vendent. Ils ne les ont pas volés aux Qatariens qui, eux, vivent dans l’opulence. Personnellement, je préfèrerais qu’ils investissent ces millions dans la création d’un monde plus juste et plus intelligent, mais comment reprocher à des pays du Proche-Orient de ne pas faire ce que nous n’avons pas fait ?

La sagesse précaire ne donnera donc pas l’instruction de boycotter la coupe du monde de football 2022.