Des musées pleins de musique

Munich ne se distingue pas par la bière, contrairement à tous ceux qui me parlent de Munich. Le désir d’alcool, l’envie de se bourrer la gueule, le plaisir de trinquer entre amis, ce sont des coutumes que tous les homos sapiens ont toujours connues, il n’y a rien là de nouveau.

Ce qui distingue la Bavière, c’est l’amour de la musique. Si je compare les équipements muséologiques en France, en Italie et dans le sud de l’Allemagne, c’est la prégnance de la musique qui me paraît distinguer le plus la culture bavaroise.

Le baroque pour tout étourdissement

La galerie verte a été construite dans les années 1730. À cette époque, l’homme fort de la Bavière s’appelle Charles-Albert, on ne le connaît pas car son ambition l’a dirigé vers l’est. Il fut même empereur du saint empire romain germanique sous le nom de Charles VII.

Galerie verte, Residenz, Munich, 1730

Dans son arbre généalogique, on voit que ses ancêtres directs sont notre roi Henri IV et Catherine de Medicis, ainsi que le grand roi d’Espagne Philippe II. Il ne faut donc pas voir les choses sous l’angle national. Un palais munichois ne vous permet pas de déceler une culture spécifiquement bavaroise, ni encore moins allemande.

Jeu de portes, de fenêtres et de miroirs

L’influence de la France, dans cette galerie verte, est évidente pour le simple flâneur. Puis on apprend que le souverain de cette époque avait assisté au mariage de Louis XV, qu’il était soutenu militairement par la France, et qu’il envoyait ses artistes et architectes à Paris pour se former.

Ces tableaux exposés, ces dorures et ces miroirs, étaient le lieu de fêtes extraordinaires, car la galerie verte était éclairée par de nombreuses bougies, et les flammes se reflétaient dans les dorures et les miroirs, créant un jeu visuel proprement étourdissant.

Ce qui importe, c’est la tendance baroque de l’Europe 1730. L’air de rien, à cette époque, on renversait radicalement les codes de ce qu’il fallait regarder.

L’oeil est autant attiré par les peintures que par les décorations

Le regard est sollicité par les décorations murales, les encadrements, les miroirs et même le parquet, autant que par le contenu des tableaux qui compose ce véritable musée privé.

Je rappelle qu’en 1730, nos villes et nos villages ne connaissent pas le musée. Pour voir des sculptures et des peintures, le peuple n’a que les églises et les cathédrales. La même chose peut se dire des livres et du savoir : les bibliothèques sont privées et les sages précaires sont employés par les familles riches qui ont besoin d’un vernis culturel pour faire bonne figure. Moi, en 1730, j’aurais probablement travaillé comme ouvrier itinérant dans les innombrables chantiers du type de la galerie verte. Je me serais fait virer pour manque de précaution et inaptitude. Je me serais cultivé sur le terrain et, comme j’aurais vite atteint les limites de mes capacités manuelles, je serais devenu précepteur pour instruire les enfants. À Munich, je leur aurais enseigné le francais, l’anglais et le latin. La philosophie et l’art. Rien qu’avec la galerie verte de la Résidence, il y a assez de richesse artistique pour constituer plusieurs années de masterclasses.