Les docks ressemblaient un peu à cela, dans les années 1980, même si cette photo fut prise il y a quelques jours. Des bateau rouges, des écluses, des fleurs.
Des bateaux qui partaient vers la mer, et d’autres qui arrivaient depuis la mer. Les docks étaient longtemps délaissés par la ville, qui avaient d’autres priorités. Des quartiers défavorisés y poussaient, des quartiers favorisés y glissaient tranquillement dans la désaffiliation. Des gitans irlandais (Travelers) y prenaient et y prennent toujours place, dans des caravanes ou dans d’autres logements plus dangereux.
Ils y vendent des choses d’occasion, des portes de pub, des cadres de fenêtres, du matériel ecclésiastique retapé. On me disait souvent, dans les années 90 et les années 2000 : « Ne traîne pas trop là-bas. »
Mais comment ne pas y voir un lieu hautement poétique ? Les fleurs, les mauvaises herbes, les écluses, la mer, les promenades ? Le soleil d’automne, le soleil d’hiver, le soleil de printemps, les pluies estvales. Les entrepôts qui virent le groupe U2 répéter et enregistrer leurs albums.
Comme toutes les villes du monde, Dublin reprend ses docks en main pour les rendre plus habitable par la population que toutes les villes du monde adorent : les jeunes cadres dynamiques.
Mon ami Tom pense que ce quartier est sans vie et qu’il n’en aura jamais, car, dit-il, l’architecture y est la même partout et que jamais les enfants n’y développeront un sentiment d’appartenance.
« Mais Tom, dis-je, n’est-ce pas la même chose avec l’architecture georgienne à Dublin ? Les Anglais ont construit les jolies rues que l’on connaît, les jolis parcs, de la même manière partout, sur les îles britanniques. Cela n’empêche pas Dublin d’être aujourd’hui très reconnaissable. »
Vous ne lirez pas sous mon clavier des mots nostalgiques contre la rénovation des docks. Non que je déteste les terrains vagues, tant s’en faut, je les adore. Mais une ville doit vivre et, surtout, doit revenir à proximité de la mer. Trop longtemps, les Dublinois ont fait comme s’ils habitaient une ville continentale. Les décorations étaient davantage tournées vers la terre et la paysannerie, alors que Dublin est une ville d’eau : la mer et la Liffey.
Les enfants, quels enfants, Tom ? Les appartements construits sur les docks ne les prevoient pas. C’est evident quand on y habite. Et c’est tres malin. Comme ca on est tranquille entre soi, personne ne braille et ceux qui voudraient pleurer savent le faire en silence. D’ailleurs tout le monde qui habite la a vingt ou trente ans, et n’a eu, du moins jusqu’ a la crise de cette annee, aucune raison de se desesperer ni de se lancer dans les enfants. 10 belles et bonnes annees d’utopie bobo au bord de l’eau qui refuserait une telle euphorie ? Et je ne parle meme pas des quais de la Liffey, des bateaux qu’ on voit passer, paquebots, voiliers et batiments de guerre, ni des levers de soleil sur la baie de Dublin …
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Oui pourquoi refuser l’utopie « bobo » et ne pas l’assumer, la revendiquer pleinement ? (pourquoi l’appeller comme çà d’ailleurs, avec ce terme, « bobo » que tout le monde utilise a tort et atravers -moi le premier d’ailleurs-avec une sorte d’autodénigrement parfois agaçant -Renaud a lancé la mode avec sa chanson « les bobos » assez amusante en fin de compte (je préfére de lui la ballade nord irlandaise…il devrait peut etre repicoler il était plus en forme et moins déprimant qu’aujour’dhui) ; ce serait bien un billet sur « les bobos » sur ce blog, je suis sur que le sage précaire pourrait le faire avec assez de brio et sucitter la polémique comme d’habitude.
A part ça vive le célibat assumé ! vive la liberté de l’homme libre – aucune ironie ici : le voyageur, what else ?- et sans attache affective, familiale et autres morveux braillards…sans attaches affectives sinon celles que procurent les paysages d’un port lointain…merci pour ce billet, ces superbes photos surtout (je n’avais aucun souvenir de cette vue du port lors de mon court séjour à Dublin). Curieusement ça m’évoque des souvenirs de ports portugais que j’avais arpenté vers treize-quatorze ans (lisbonne ou porto -hips-. La aussi il y’a des travaux de recherches sur les différentes façons d’aborder, de contempler les ports (optiques, haptiques, etc…) qui me trottent dans la téte. « Poésie des ports/docks européens » un beau sujet, mais c’est pas le tout d’avoir des idées…
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Le discours de jmg le clézio, prix nobel (l’inventeur de mondo, ce garçon qui reve sur les bords du port de Nice) : http://lewesternculturel.blogs.courrierinternational.com/archive/2008/12/08/discours-de-j-m-g-le-clezio-au-nobel.html
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