Un tarin horrible que j’ai fini par accepter

Quand j’étais jeune le nez de ce personnage m’empêchait de me délecter. Je lisais des livres d’histoire de l’art, je passais ma vie dans les musées, je m’imprégnais de la Renaissance italienne pour me faire le regard, et cet énorme tarin me repoussait systématiquement.

Comment pouvait-on qualifier de chef d’œuvre un tableau si quelconque orné d’un appendice si abject ? Comment même regarder cela ?

Maintenant que j’ai vieilli tout a changé.

1. Le nez du grand-père ne me choque plus. Mon dégoût était à mettre sur le compte de mon jeune âge.

2. Je suis touché et ému par le sentiment d’amour familial qui est délicatement dépeint dans cette peinture.

3. Je mesure combien il etait novateur au XVe siecle de peindre une scene aussi intime entre un enfant et son grand-père.

4. Ce nez apporte trois éléments fondamentaux : il témoigne des maladies de son temps, il signe le début du réalisme en peinture et enfin il montre cette faculté qu’ont les petits enfants d’aimer leurs parents sans conditions.

Enfin tout dans cette composition, notamment l’étrange paysage qui se déploie par la fenêtre, résonne en moi comme l’accomplissement d’un chef d’œuvre absolu de l’art occidental.

3 commentaires sur “Un tarin horrible que j’ai fini par accepter

    1. Tout à fait. À quoi s’ajoute la décrépitude du mur, qui semble faire écho aux pustules sur le nez de l’ancêtre. N’oublions pas que le peintre, Ghirlandaio, est mort de la peste dans les années 1590. Les pustules et les beautés pures, on savait ce que c’était et on savait en rêver.

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  1. « il montre cette faculté qu’ont les petits enfants d’aimer leurs parents sans conditions. »
    Les enfants acceptent les vieux « en état », sans se poser de question. Ceci dit la notion d’amour est une pure interprétation du narrateur. J’en propose une autre: le gros pif boursouflé symbolise le regard de l’enfant dans toute sa crudité.

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