On est toujours trop bon avec les femmes

En 1947, Raymond Queneau a sorti un roman bizarre intitulé On est toujours trop bon avec les femmes sous le pseudonyme de Sally Mara. L’action se déroule dans le bâtiment de la poste, à Dublin, lors du soulèvement de 1916.

Une femme reste coincée dans les toilettes pendant que les assaillants prennent la poste. Ils se croient seuls à l’intérieur quand on s’aperçoit de sa présence. Commence alors une histoire tragi-comique où les questions de sexualité, de religion et de politique s’entremêlent savamment.

La compagnie « Theatre of pluck » met en scène l’adaptation du roman traduit en anglais : We always Treat Women too Well. C’est à voir ce week-end à l’université Queen’s, Belfast.

Les spectateurs achètent leur billet et sont invités à sortir pour aller rejoindre la salle de théâtre en petits groupes, tandis que, dans les travées de l’université, des acteurs jouent des scènes de rébellions.

La pièce est très bien jouée, la musique d’accompagnement est jouée sur scène, par les comédiens eux-mêmes, sur des instruments dispersés dans la salle.

Le public est assis sur des chaises de part et d’autres d’un espace libre, ni scène, ni cirque.

La femme que les révolutionnaires découvrent est agnostique et méprise tous ces papistes. En même temps, elle est séductrice, et par son hyperactivité sexuelle, elle trouble profondément les soldats qui sont pourtant détenteurs des armes, de la puissance. Ils ont tous les droits sur elle, puisqu’aussi bien ils sont dans une zone de non-droit, mais curieusement, on ne sait plus qui viole qui, et l’histoire évolue vers une mascarade où les identités se dissolvent, pour finir par le meurtre du couple de soldats irlandais homosexuels.

La question du droit des femmes – ce que le metteur en scène appelle un « proto féminisme » – était très présente dans les mouvements « pro-irlandais » du début de du XXe siècle. La déclaration d’indépendance de 1916 stipule le droit de vote des femmes, et le théâtre de ces années-là faisait surgir des problématique de cet ordre. Ce sont les particularités des temps révolutionnaires et des mouvements de libération : une agitation des idées et des valeurs qui permettent à des intellectuels, des philosophes, de côtoyer un peu tout le monde.

Le metteur en scène, Niall Rea, tient à ajouter la question homosexuelle (‘queer’) à celle des femmes. Il se sert du roman de Queneau pour revisiter cet aspect de l’histoire irlandaise, n’est-ce pas délicieux ? Donnons-lui la parole : « In this stage adaptation of this outrageous literary oddity, I will re-examine the ‘queer’ qualities of the story of 1916 as perversely told by Queneau… »

Rien que pour cela, on devrait inviter cette production en France. Cela pourrait donner envie de relire Queneau, de s’intéresser à l’histoire irlandaise, et de voir comment les questions sexuelles sont posées et reposées, au sein de l’université et des arts vivants britanniques.

28 commentaires sur “On est toujours trop bon avec les femmes

  1. moi j’adore Queneau,ca été un choc quand j’ai lu « les fleurs bleues  » et que j’ai suivi les cours du spécialiste français de QUENAU, a ma premiére année de fac, Daniel Delbreil qui m’a initié (entre autre) a la poétique des textes, au poétique tout court d’ailleurs aussi, car j’ai découvert ce grand écrivain en pleine gréve de 1995, ce qui pour moi reste loin d’étre anodin, surtout si l’on sait les conviction s politiques de Queneau et que « zazie » est un personnage qui évolue dans un paris en gréve..L’oeuvre est si riche qu’il faut des jours pour savourer la subtilité et la profondeur de certains ouvrages. Derriére son humour, le coté on-rigole-on-s’amuse, derriére la fantaisie « bon enfant » se cache un écrivain qui a une vison du monde parfois terrible,dure, violente et parfois tragique, desespérée, une vison a coté de laquelle Cioran est un enfant de choeur et peut aller se rhabiller avec ses aphorismes qui n’amuse plus que lui. J’ai même failli me lancer dans un travail de longue haleine de rejerche sur son rapport avec la nature il y’a quelques années,mais cette vison tragique m’a arrété, bloqué, derriére le vernis « humour », on « rigole », bah c’est parfois sinistre il faut le dire et on rigole plus trop alors… puis il y avait tellement à dire que je me suis perdu dans mon sujet et les textes, par manque de rigueur et de motivation aussi…mais ca reste un grand ecrivain drole, et génial dans la lignée d’un Jarry bien sur qui a ouvert la voie a pleins d’écrivains. Il prive que l’on peut faire de la littérature vraiment intelligente et populaire, drole et tragique a la fois. C’est je continue à le penser l’un des plus grands ecrivains français du vingtiéme siécle dans la lignée d’un Zola pour ses romans parfois néo-naturalistes (j’ai un ami chercheur qui a travaillé sur la decription chez Queneau , je ne sais plus ou il en est d’ailleurs avec ca, mais Queneau a sans que l’on s’en apercoive redéfini , bouleversé en douceur avec sa douce mais parfois troublante fantaisie tout une tradition du descriptif dans le roiman, c’est passionnant evidemment ) .Peut etre que je m’y remettrai un de ces quatre matins…

    J’aime

  2. J’ai fait un saut à la bibliothèque, hier, pour relire On est toujours trop bon. Après l’adaptation théâtrale, c’est une vraie expérience. C’est vraiment un roman étonnant, et ça m’a fait réfléchir sur l’art de Queneau, en général. Il me donne l’impression d’écrire dans une période qui était un âge d’or du roman. On prenait des personnages, n’importe lesquels, et on écrivait au fil de la plume, chaque jours quelques pages, avec un investissement personnel presque nul dans l’intrigue et les dialogues. Cela fait des romans qui « ont quelque chose de génial » mais qui ne peuvent pas être aussi marquants que d’autres livres plus radicaux, plus novateurs. On dit toujoursque Queneau n’est pas aussi connu qu’il le mérite, mais je trouve qu’il est connu comme il le mérite. On lira ses livres cent ans après leur publication, ce qui est rare. Et en plus, les Anglo-saxons commencent à s’y intéresser, alors qu’on le croyait intraduisible, que demander de plus ?

    J’aime

  3. « il est connu comme il le mérite » ? ah bon tu trouves ? moi pas… moins radical,moins novateur que d’autres auteurs déja archi connu et reconnu,panthéonisé et /ou nobélisé (joyce,proust,claude simon ? de mieux en mieux..) que demander de plus ? un peu plus de discernement cher sage précaire. Enfin,si lesanglaiscommencent a s’y interesser (et toi par lameme occasion), c’est déja un (bon, trés bon) début hé hé.

    J’aime

  4. Je ne voudrais pas frimer, mais moi, cela fait 20 ans que je lis Queneau. Bientôt 20, disons dans les 18 ans. Je le lisais déjà lorsque Ben, il y a de cela exactement 17 ans, presque jour pour jour, nous vantait les mérites philosophiques des Fleurs bleues.
    Et de fait, comme il n’a pas vraiment inventé au niveau formel (Queneau, n’est-ce pas? Pas Ben. Ben, c’est autre chose), et qu’il a vécu à une époque où cela inventait pas mal, il est un peu condamné à jouer les seconds rôles dans les « Histoires de la littérature ». Mais comme je dis qu’il sera encore lu dans les années 2030-250, je prétends qu’il a la place qu’il mérite. On s’en souviendra, on le pratiquera, mais on ne le placera au même rang que ceux que tu as cités, ce qui n’est que justice.

    J’aime

  5. Ca me rappelle un sujet de dissertation de lettres, il y a bien longtemps, sur la création et l’originalité en art, un truc comme ça, leur aspect révolutionnaire supposé ou réel. Moi, il me semble que j’avais pris l’exemple de Bach pour dire que le chef d’oeuvre n’était pas révolution, un auteur uniquement préoccupé de la forme n’aurait été que « réactif », mais achèvement d’un style poussé à sa perfection. Bach reprend un style déja démodé, le baroque avec son contrepoint austère et ses genres vieux d’un siecle, alors que ses contemporains novateurs introduisent déja une liberté lyrique et un souci d’innovation formelle. ( Quels contemporains? Aucun souvenir. Des Italiens ) Le génie de Bach, c’et d’avoir porté un genre à sa perfection. Le génie de Proust, c’est un peu pareil : Proust réinvestit la langue de Saint-Simon ou du Cardinal de Retz, avec leurs longues périodes qui claquent en fin de phrase, e il en fait un « monument », comme disait Deleuze, un classique.

    Je crois que j’avais eu une mauvaise note, 8 ou 9/20. Je devais être un peu trop péremptoirement contre-révolutionnaire.

    J’aime

  6. Bien parlé Ben, ton prof n’a rien compris, ca arrive, et oui… – de quoi traumatiser à vie un éléve… quand on brime le ton peremptoire contre révolutionnaire d’un éléve, c’est qu’on n’a rien compris, surtout quand la « révolution « ici c’est l’institution avec ses dogmes artisrtiques qu’il faut étudier et comprendre biens sur, mais aussi savoir dépasser : Bach, Proust,etc… .Enfin …j’ai des exemples aussi de copie rayés de rouge (avec un 6 ou 7 à la clef oh la la) pour avoir osé dire (il y’a une petite quinzaine d’année) que Jean D’ormesson n’était peut etre pas le grand écrivain que l’on nous présente et que c’était un « cabot mondain sans avenir »…bon…j’avoue, j’ai lu par hasard son bouquin mémoire et il y’a des trucs pas mal ,mais de la a dire que c’est un génie comme Chateaubriand (que je ne connais que par Lagardee et Michard, pas lu une ligne de « Mémoire d’Outre Tombe.. ».oh le vilain prof de français re-scandale !) la non !
    Voila on essaye de sortir des sentiers battus (de « battre la campagne » hi hi), de la jouer révolutionnaire (mais au fond, même pas, ca me parait normal au vingt et uniéme siécle de mettre sur le même plan Proust/Queneau/ en essayant (oh scandale, mon dieu c’est affreux, oh la c’est le drame Proust et Queneau sur le meme plan ??!! le sage précaire va faire des cauchemars c’est sur) de mettre sur le même plan les panthéonisés lagarde-michardisés et les (en plus !) déja presque lagarde-michardisé (quand on s’interesse un tant soit peu aux manuels de littératures contemporains,de la popularité de l’OULIPO dans beaucoup d’institutions littéraires -qui ne passe pas a la télé, le sage précaire va etre déçi alors…-, de ses descendants etc…Perec, Jacques Jouet, Roubaud, on se rend compte que Queneau est déja pour beaucoup…sans compter la veine humour qui a donné naissance de façon subtile a Vian, l’esprit « Hara-Kiri », San Antonio..bref toute une partie de la vie culturelle française des disons cinquante derniéres années, rien que çà… -oh la la la, Saint Assouline priez pour François ce mécréant : Proust et Asssouline sur le meme plan (euh non, surtout pas..labsus de mécréant contre révolutionnaire pardon).Proust et San Antonio sur le même plan, mais vous débloquez ma parole, au bucher le Françoué !! ). Pas besoin de lire tous les structuralistes, tous les ouvrages de genette et toutes les histoires littéraires imaginables pour savoir que la littérature se nourrit toujours de ses predecesseurs et que c’ est un dialogue perpetuel ( un entretien infini dixit Blanchot, alors, si Blanchot le dit..) avec les oeuvres du passé et que d’ailleurs elle se fout du Panthéon et se moque du Lagarde et Michard, de manuels scolaires, la littérature…En plus, je voudrais pas plomber l’atmosphére mais personne ne sera la pour dire dans cent ans quel  »role » (qu’est ce que c’est ce cinéma enfin ?) aura Queneau dans cent ans…(premier, deuxiéme…dans cent ans, Proust et Queneau seront rangé au rang d’écrivain de langue morte,et les éléves prendront en option littérature « langue premiére » ou « langue seconde » suivant le niveau d’illetrisme voila la vérité et la réalité!!! On ne faira aucne comparaison et on les lira comme on lit aujourd’hui Plaute ou Sénéque , des auteurs latins dont tout le monde se fout de savoir quel « role « ils ont ou on eut ou auront…c’est sur qu’on le lira en 2030-2050 Queneau mais a ce moment la… nos petits enfanst se foutront de notre gueule quand ils liront ces débats sur les blogs et se demanderont
    -Quand même… ce sage précaire la… il fumerait pas trop la moquette parfois ? l’Assouline est en vente libre ok , mais c’est dangereux pour la santé non ? tout le monde le sait aujourd’hui hein papa…
    – Euh la santé neuronale surtout mon petit… ca bloquait juste ce qu’on appelait a l’époque le discernement littéraire..l’Assouline (a ne pas confondre avec la Mescaline…) EST UN TReS BON EXEMPLE… a consommer avec modération (si tu en trouves encore en vente aujourd’hui bien sur…) mais tu sais a cette époque au début du siécle entre Assouline,d’Ormesson, Zemmour , Houellebecq toutes ces drogues… les gens lisaient n’importe quoi, des bouqins il y’en avait des tas, trop meme, les rentrés littéraires , c’étaient l’orgie, l’enfer de la dépendance, ca faisaient des ravages, un peu comme l’absynthe a la fin du dix neuviéme siécle…mais comme c’étaient des drogues incolores, inodores, et douces on n’a vu les dégats que juste aprés vers les années 2010-2020…la tu vois sur ce blog le sage précaire est en train de sombrer

    J’aime

  7. Tu n’as pas fini ton raisonnement Ben. L’achèvement d’un style, bien, pourquoi pas (Bach, malgré tout, fait plus que parachever ce qui se faisait : il n’y a rien qui ressemble à la Passion selon Saint Mathieu, même en moins bien, dans tout le XVIIe siècle. C’est Buxtehude ou Schütz, dont on a une Passion selon Saint Jean ? Rien à voir avec celle de Bach, mais rien. Si, sur les techniques musicales, mais il y a bien une invention formelle majeure dans les Passions de Bach.)
    Mais quid de Queneau ? A-t-il parachevé un art du roman, d’après toi ?

    J’aime

  8. Je me suis emporté tout à l’heure, c’est un peu con, pardon, mais j’adore vraiment Qunenau… moi ca doit faire disons treize-quatorze ans que je lis Queneau et sur l’art du roman , il y’a ce trés beau livre : « batons, chiffres et lettres » chez folio-essai, un recueil d’essais, d’articles et un journal intime ecrit pendant la seconde guerre mondiale que je relis souvent. MMon idée personnelle est que Queneau n’élabore pas comme proust une poétique ou un « art du roman », c’est trés différent mais en même temps assez semblable comme approche littéraire..c’est un peu long a expliquer….De toutes façons, les deux changent notre perception du réel de façons pertinentes (et trés différentes) et c’est cela qui compte vraiment.

    J’aime

  9. Voila une trés bonne nouvelle cher Mart, une nouvelle qui me ravit et me permet d’apaiser mes regrets de mémoire non abouti sur Raymond Queneau . Je te conseille de lire « Le Chiendent » (le premier roman de Queneau), une réécriture (d’aprés lui et avec son humour particulier…) du « Discours de la méthode » de Descartes, « Chéne et Chien, suivi de petite cosmogonie portative »( un travail de « pastiche » ébouriffant, fantasmasgorico-scientifique et surtout poétique de Boileau); commence par les « Fleurs bleues », c’est un vrai bonheur.

    J’aime

  10. Les « styles », c’est pas grand’chose. Je connais des romans, chacun à lui-même son propre style. La perfection d’un être a les mêmes limites que son essence, disait Spinoza. Alors Queneau a pu porter à sa perfection absolue le Roman de Queneau, genre masculin dont le féminin est la romance de quenelle. Voilà ce que je peux en dire pour conclure mon raisonnement en restant fidéle à mes amours d’il y a vingt ans.

    J’aime

  11. « Queneau a pu porter à sa perfection absolue le Roman de Queneau. »
    Même cela, je n’en suis pas certain. Tu es sûr de toi, Ben ? Je ne les ai pas tous lus, tant s’en faut, mais j’ai l’impression qu’au contraire, Queneau n’est pas allé au bout de ce que ses romans offrent comme promesses narratives. Que le roman de Queneau parfait est encore à venir, que ceux qui sont écrits empruntent encore trop à des procédés de narrations communs pour l’époque. Que si, justement, il avait fait un seul roman de Queneau pur, il serait au premier rang des romanciers du XXe siècle, comme ces inventeurs de formes pures que sont les créateurs du roman proustien, du roman mannien, du roman célinien.

    J’aime

  12. C’est justement cette ouverture sur un eternel « possible » du « pur » roman « quenien » qui fait la force de Queneau et le met dans la ligné e d’un Proust, Céline, Mann ces dinosaures batisseurs de cathédrales littéraires que personnelement je n’arrive jamais a finir ou a lire de la premiére a la derniére page. C’est un style « ouvert » sur la possibilité d »un style a venir. Comme Barhes avec la critique qui se refuse a s’enfermer dans le role de critique et questionne sans cesse ce genre, Queneau interroge le style en le questionnant, travaillant, relativisant sans cesse dans le desscriptif, avec ses personnages, ses jeux de mots, en perpetuel mouvement… Queneau, luine batit pas des cathédrales mais batit (comme Ponge) des petites eglises de campagne avec l’ambition de parvenir a les faire aimer comme des cathédrales. Il croit au détail, a la force des petits riens, le quotidien,la monotonie et la poésie débordante au petit bistrot du coin, la rue ou boulevard habituel….il n’a rien a voir avec les grands emportements, tourments, mouvements melo-dramatiques a la Hugo que j’adore mais pourtant il m’y fait penser quelquefois, c’est peut etre un peu gros mais c’est mon point de vue et j’y tiens. Il veut dépasser cette notion de pureté, pire (ou mieux selon les points de vue et les gouts , les styles…) il s’en moque et en joue avec plaisir et nous fait partager cette joie de la construction ( déconstruction aussi quand on y pense, c’est a creuser…) du « pur » littéraire (qui n’existe pas):, cet « absolu littéraire » chers aux romantiques allmemands ; les « exercices de style » sont de ce point de vue une invitation a « relativiser » ces grandes constructions romanesques lyriques et grandioses que tu évoques sans pour autant les renier.Comme Ponge , Queneau n’aime pas le lyrisme , trouve les postures romantiues déplacées, voire malsaines au vingtiéme siécle et je crois qu’il a bien raison. Et puis, il y’a aussi le fait que Quenenau , je le répéte a bouleversé énormément de choses au sein de l’institution littéraire ; Un champ que l’on a tendance a négliger, mais sa position d’éditeur , de directeeur de collection chez Gallimard a été determinant pour la littérature française des cinquantes derniéres années (il découvre Duras, Louis René Des Forets est copain avec Leiris et Perec par exemple ce qui n’est pas rien); A ce sujet , la lecture de son journal intime et la vision qu’il donne du petit monde littéraire français entre disons 1940 et le début des années 1970 est un vrai trésor, un régal de lecture, les anecdotes sur les travers des uns et des autres est jouisif au premier abord,mais il demeure quand même malgrés tout un fond profondément mélancolique, une vision tragique du monde et de l’homme qu’il fait passer a coté duquel Cioran c’est Casimir.

    J’aime

  13. Un peu de Métaphysique.
    Le roman parfait de Queneau est encore à venir, ça c’est une évidence, comme tous les romans parfaits, mais ce n’est pas incompatible avec une proposition du genre : (« les dimanche de la vie », ou « les fleurs bleues » sont la perfection des essences respectives des « dimanche de la vie » ou des « fleurs bleues »). « Le » roman parfait de Queneau, ce n’était en effet pas encore une essence, juste une abstraction généraliste et, en tant que telle, sans grand intérêt.
    Il n’est d’ailleurs pas complètement indifférent à ce sujet que Queneau, membre de l’Oulipo, soit lié à la Pataphysique, fondée par Jarry, cette Science de la Science, parce que science des possibles en tant que possibles, dont les essences réelles qu’étudient la Physique ( du point de vue de leur essence déterminée actuelle ) ou la Métaphysique ( du point de vue cette fois des conditions de toute détermination actuelle ) ne sont elles-mêmes qu’une actualisation plus ou moins contingente. Ainsi, « être fleur bleue », qu’étudie la Botanique, n’est qu’une modalité d’être tout court, qu’étudie la Métaphysique, qui n’est à son tour qu’une modalité d’avoir d’abord été possiblement fleur bleue et de virtuellement être ensuite devenu autre chose, souris verte ou crapaud noir, que ce que le possible laissait attendre, et autres territoires conceptuels ultimes qu’étudie la Pataphysique.
    Bouffre, comme disait le Père Ubu.
    Il entre ainsi dans l’essence des romans pataphysiques de Queneau de contenir tout autre chose que ce qu’ils sont, et on considérera sans nostalgie que, même si certes ils laissent attendre mieux que ce qu’ils ne sont, ils sont aussi possiblement beaucoup plus que ce qu’ils paraissent.
    Au fond, pour conclure sur la Pataphysique, il n’y a qu’une science qui pourrait lui être supérieure, ce serait la Science des Impossibles en tant qu’Impossibles, une « Paraphysique », et là on frôle la Mystique. Ce n’est pas pour me vanter, mais moi, je connais cette science : elle s’appelle « Analyse non-standard », et c’est une branche des Mathématiques développée par Abraham Robinson sur les fondements du fameux Théorème de Löwenheim-Skolem.
    Cherchez avec Google, vous verrez si j’ai pas raison.

    J’aime

  14. Ben merdre alors il parle drolement bien le pere Ben, il a pris des cours du soir a l’Institut de Pataphysique option Métaphysique fleur bleue, c’est-y-pas merveilleux…kicésinon ce A Moi a l’institut catholique option technicien bibliothécaire on m’a dit que google c’est caca donc depuis Je me demande même si il ne vient pas d’inaugurer le premier « post » post quenien posté du Gabon ce qui mais a le lire

    J’aime

  15. « Le roman parfait de Queneau est encore à venir, ça c’est une évidence, comme tous les romans parfaits », je ne suis pas d’accord. Le roman beckettien a une forme achevée dans les derniers bouquins de Beckett. le roman existentialiste a une forme achevée dans « L’etranger » de Camus, ou « L’enfance d’un chef » de Sartre.
    « ”les dimanche de la vie”, ou “les fleurs bleues” sont la perfection des essences respectives des “dimanche de la vie” ou des “fleurs bleues” », je ne suis pas convaincu. Ca a l’air rigoureux mais, je ne sais pas, je ne suis pas convaincu. Pour le reste, je ne dis pas.

    J’aime

  16. Dans « pataphysique », il y a certes « physique », comme dans « métaphysique », mais il y a aussi « pata » comme dans « patapouf » et « patatras ». Méditez bien là-dessus.

    Je pense qu’il est assez vain d’essayer de classer des oeuvres d’art. Par exemple, jamais, mais alors jamais je ne mettrai un roman de Tartre, pompeux et didactique, au-dessus d’un bouquin de Queneau, même si celui de Sartre réalise une « essence » ( d’ailleurs, il serait assez ironique qu’un roman existentialiste parachève une essence, c’est l’existence qui précède l’essence, n’est-ce pas ? ) Moi, les romans existentialistes, c’est bien simple : je ne les mets pas en-dessous de ceux de l’Oulipo ; je ne les lis pas, ce qui m’évite d’avoir à échafauder une hiérarchie pénible et, de toute façon, arbitraire.

    Il n’y a pas de hiérarchie, ni bien ni mal relatifs ou absolus, ni plaisir ni déplaisir. «  »Ni le juste ni le voleur ne peuvent être causes d’un plaisir ou d’un chagrin de Dieu », disait Spinoza.

    J’aime

  17. Au fond je suis encore assez d’accord avec Ben sur cette histoire de classification débile, même si j’ai eu le défaut de lire et d’apprécier les romans existentialistes à un certain age ( de Sartre a Camus en passant par Bernard Noel… je n’en ai relu aucun depuis l’adolescence… remarquez ils m’ont quand même marqué, peut-etre même traumatisés quand j’y pense…). Queneau est le vrai antidote a cette littérature finalement,il permet de relativiser beaucoup de choses, de dédramatiser, de rire un bon coup et de dire ce que l’on pense ne se foutant de l’institution, de dépasser l’esprit de sérieux qui sclérose tout et rend tout mortifére, angoissant… c’est pour ça que je parlai de crise d' »antalgie aiguie » l’autre jour, c’est un terme qu’il a lui même inventé pour se foutre de la gueule de Sartre avec son concept d »ontologie » (dans « loin de Rueil » un grand livre aussi). Ceci dit en passant c’est bien c’est que le « buzz » quenien généré par ce billet gagne même les terres d’Afrique , moi tant que la divine parole quenienne et ses saints apotres oulipiens s’exportent aussi bien, continuent a faire débat, suscitte la polémique via blog je suis content, voire ravi. Je me demande même si je ne vais pas contacter des quenophiles non repentis ou des quenophages underground de ma connaissance pour qu’ils jettent un oeil sur ce billet et ses commentaires et qu’ils y participent peut etre…c’est peut-etre déja fait (ce qui ne m’étonnerait guére hé hé…)

    J’aime

  18. Sinon, personnellement, le « pata »ca m’évoque tout de suite cette superbe chanson de cette chanteuse africaine que j’aime beaucoup, Myriam Makeba disparue derniérement peu de jour aprés l’election d’Obama. Rien a voir avec Queneau me direz vous…

    J’aime

  19. « Je pense qu’il est assez vain d’essayer de classer des oeuvres d’art », Ben.
    Je ne peux pas être en désaccord, puisque c’est ce que tu penses, mais je note que ta vision de la littérature date.
    On doit pouvoir classer. Moi, j’adore classer, classifier, nommer, sous-nommer, taxinominer. C’est d’ailleurs largement là-dessus que va porter ma thèse, mais dans le domaine de la littérature du voyage. Quand et où commence un récit de voyage, et quand finit-il pour laisser place à un roman, une autobiographie, un essai d’ethnologie ou de géographie, un recueil de poème.
    Je ne comprends pas qu’un logicien comme Ben puisse dire qu’on ne peut classer les oeuvres d’art. Mais je présume que tu voulais parler de hiérarchie, de jugement de valeur.
    Pour ce qui est des mérites respectifs de Sartre et de Queneau, je rejette fermement l’idée que tous les écrits de Sartre seraient pompeux et didactiques. Les nouvelles du « Mur » constituent une lecture qui te bouleversera, mon bon Ben. Le jour où tu t’y mettras, je gage que tu seras fortement ébranlé.

    J’aime

  20. des jours de commentaires pour arriver a ce projet fou, insensé, un but qui donne sens à ma vie, ce billet aura eu ce mérite : diffuser la bonne parole Quenienne via discussions de toutes sortes, débat pataphysique et orgies oulipiennes en tout genre, théses et colloques pourquoi pas ! merci o grand sage précaire maintenant je peux dormir en paix, je sais ou je vais.

    J’aime

  21. Orgies ? queuenophiles ? queueneauphages ? hmmmmmm ca m’interesse (et ca m’exciiiiite….rehmmmmm) : );;;mais c’est quoi Oulipo ? une chaine de fast food ? je suis végétarienne. ; )

    J’aime

Répondre à Francois Annuler la réponse.