Soirée franco-chinoise à Lyon

Soirée franco-chinoise, galerie Françoise Besson

On se souvient que la grosse problématique de cette soirée concernait la date du 8 août.  On nous promettait une solitude sibérienne. La Galerie Françoise Besson fit bien les choses, mit les petits plats dans les grands, et nous nous vîmes une bonne cinquantaine de personnes au plus fort de la soirée.

Guillaume Thouroude, galerie Françoise Besson, photo Catharina Bertoni.

Ma nièce Coline, qui était venue avec sa grand-mère (la mère de mon frère JB, ma mère pour ainsi dire), fit le compte des pique-assiettes qui avaient limité leur action culturelle à vider les bouteilles et les plateaux de bouffe. Un mec qui m’a abordé à la fin, n’a paraît-il strictement rien écouté de la soirée, et bu exactemet 18 verres de vin.

Il n’avait pourtant pas l’air plus ivre que moi quand il m’a parlé.

Françoise, la directrice de la galerie, mi amusée, mi bienveillante

Françoise Besson, la directrice, m’avait logé dans un appartement de grand standing, au-dessus de sa galerie. C’est un appartement qu’elle loue à des vacanciers ou des conférenciers, et qu’à l’occasion elle destine à des artistes et des écrivains en mal de logement. En l’occurrence, j’entrais dans la case « écrivain en résidence ».

Françoise est un de ces personnages qu’une ville se félicite d’avoir en son sein : dynamique, généreuse, à l’organisation parfois baroque, fourmillante d’idées, elle prend des risques pour l’amour de l’art. Elle entreprend comme d’autres jonglent avec des quilles en flamme, et à la fin, les projets improvisés prennent forme on ne sait trop comment.

La « bonne » ville de Lyon (toujours ce qualificatif mystérieux accolé à ma ville natale) a besoin de gens comme elle, un peu fous, n’ayant pas peur de faire du name dropping, quitte à se mélanger les pinceaux avec les names que l’on droppe. Les « bonnes » villes en général ont besoin d’individus comme Françoise, qui n’ont pas froid aux yeux, et ne craignent pas de lever de fortes sommes pour faire construire une maison d’architecte en plein quartier de canuts.

En conséquence de quoi, sa galerie d’art contemporain, au 10 rue de Crimée, à la Croix-Rousse, est un des haut lieux de la création et s’est imposée dans les foires internationales.

Chen Xuefeng, photo Catharina Bertoni

Dans la galerie, c’était l’exposition d’une ravissante artiste chinoise vivant à Lyon, Chen Xuefeng. D’où l’opportunité d’organiser une soirée autour de notre livre Traits chinois/Lignes francophones. Chen Xuefeng est originaire du Yunnan et son art est très influencé par les arts décoratifs et religieux de la minorité Yi, dont sa mère fait partie.

Broderie, céramique, c’est avec d’anciennes méthode que cettte jeune femme parle de la douleur et du plaisir d’être une femme.

Chen Xuefeng, photo Catharina Bertoni

Ce fut une belle rencontre, et il est maintenant question de collaborer à nouveau sur le catalogue des oeuvres de Chen Xuefeng. Prions les divinités Yi que ce projet aboutisse à son tour. Nul doute qu’il empruntera des chemins détournés.

Il n’y eut que des belles rencontres autour de ce 8 août, et c’est une des réussites de la galerie de Françoise de les rendre possibles tous les jours : Catharina Berthoni, photographe brésilienne, a elle aussi éclaboussé de son charme et de son talent cette soirée. Elle a été une pièce maîtresse dans l’organisation, ainsi que dans la représentation de l’événement.

Oeuvre de Chen Xuefeng, Galerie Françoise Besson, photo de Catharina Berthoni

En revanche, Françoise et ses invités se connaissent depuis si longtemps qu’on ne compte plus le nombre des années. Ce serait inconvenant. La superbe Cécilia de Varine est venue nous parler du tableau Malade fiévreuse de Chang Su-Hong, qu’elle a redécouvert grâce à ses recherches dans les réserves du musée des Beaux-arts de Lyon.

Cécilia de Varine, photo Catharina Bertoni

Nous avons profité de la présence en France du non moins superbe Benoît Carrot, plus connu sur ce blog sous le pseudo Ben. Professeur de philosophie expatrié au Tchad, il nous a gratifié de sa faconde impeccable et nous entretenu de la francophonie chinoise en Afrique centrale.

Benoît Carrot, photo Catharina Bertoni

Tout comme le livre lui-même, qui est constitué d’une toile d’arignée d’amitiés tissées sur tous les continents, cette soirée était placée sous le signe de la vieille connivence entre des Lyonnnais fringants. Originaires de Haute-Savoie, du Forez et de Bourgogne, mes compagnons ont eu la plaisante idée d’être brillants, drôles et stimulants.

Je ne sais pas si je peux dire de mes copains qu’ils sont tous des sages précaires comme moi, sans doute pas, mais ça n’a pas d’importance. La chaleur des relations humaines ne se mesure pas à l’identicité des destinées sociales (comprenne qui pourra).

Le sage précaire et Ben, photo Catarina Bertoni.

13 commentaires sur “Soirée franco-chinoise à Lyon

  1. J’aime bien l’expression « Elle entreprend comme d’autres jonglent avec des quilles en flamme, et à la fin, les projets improvisés prennent forme on ne sait trop comment. »
    Le sage précaire a raison d’apprécier les rassemblements, les rencontres et ceux qui les organisent. Et puis c’est assez curieux finalement, à une époque ou tout le monde vit le nez sur son smartphone 😛
    Sinon les origines Yi de cette belle artiste chinoise me font penser au bouquin « la passagère du silence » de Fabienne Verdier. Tu l’as peut-être à lu? J’ai trouvé ça mal écrit mais intéressant.

    J’aime

    1. Merci Damien. J’ai un peu lu Fabienne Verdier, mais ça ne m’a pas plu du tout. Je ne sais plus pourquoi. Je crois que c’est sa manière de parler de la culture chinoise, ou de son propre art, qui m’a gêné. Pourquoi, quel rapport avec la minorité Yi ?

      J’aime

      1. De mémoire, donc je peux me tromper, elle raconte une excursion en montagne ou elle touche la natte d’un homme de la minorité Yi, ce qui est considéré comme sacrilège à l’époque. S’en suit une échappatoire un peu rock’n’roll.

        Sinon cette artiste a un joli prénom d’alpiniste ( 雪峰 ) et je vois qu’elle est passée par les Arts Déco de Stras. Pourquoi ai-je un jour arrêté de draguer là-bas? Je me le demande…

        J’aime

  2. Brillé de mille feux, c’est un peu exagéré. En réalité, j’ai essayé de comprendre les questions à portée philosophique que me posait une dame sans vraiment y parvenir.

    Quelqu’un a-t-il compté les verres de vin bus ? Bigre, ça fait froid dans le dos. Surtout qu’il y avait aussi ce liquide chinois, là, qui comptait double ou même triple. Comme l’a dit mon frère, 45 minutes de conférence, 4 heures d’apéro, ça fait un très bon bilan culturel. On se serait cru de retour dans les années 90.

    Toute destinée est précaire malgré la disparité des trajectoires sociales, vivons heureux en attendant la mort, comme disait mon prof de philo en terminale.

    J’aime

  3. Confucius a dit : il ne faut jamais cesser de draguer a Strasbourg. Qui le fait est un papillon sans ailes.

    Voila. C’est Confucius en meme temps. C’est pas toujours facile a comprendre.

    J’aime

    1. Citation de Francis Jammes :

      Confucius rendait les honneurs qui leur conviennent
      aux morts, dans l’Empire bleu du Milieu.
      Il souriait parce que l’eau éteint le feu
      comme la Vie éteint l’homme vers l’époque moyenne.

      Il n’ornait pas ses paroles merveilleusement
      comme certaines coupes des Grands de l’Empire.
      La tanche, qui est comme un vase de Pagode riche,
      n’a pas besoin d’être ornée artistiquement.

      Il allait avec une grande modestie au Palais,
      écoutant sans colère les joueurs de flûte
      qui adoucissent les sentiments comme la lune
      adoucit, sur la montagne brûlée, les arbres violets.

      Il parlait avec une respectueuse cérémonie
      aux principaux de la ville et au chef de la guerre.
      Il était bon, sans familiarité vulgaire,
      avec les gens du commun et mangeait leur riz.

      Il se plaisait aux choses de la Musique,
      mais préférait les instruments de simple roseau
      cueilli près des marais de vase douce et jaune
      où l’oiseau sans nom qui fait yu-yu se niche.

      Il se permettait, pour le bien de son estomac, les épices.
      Il aimait, vers le soir, à discuter de belles sentences,
      et il aurait voulu qu’on suspendît aux potences
      qui servent aux lanternes, des moraleries.

      Il parlait peu d’amour, davantage de la mort,
      quoiqu’il déclarât que l’homme ne peut la connaître.
      Il aimait voir les jeunes gens à la fenêtre,
      les trouvant bien, à demi cachés par les ricins gris mais rouges.

      Le soir il allumait des baguettes de parfum,
      puis tournait gravement un moulinet où les prières
      s’enlaçaient comme de belles pensées dans la cervelle
      d’un jurisconsulte ou d’un poète de talent.

      Il allait aussi voir les bâtiments de la Province,
      se réjouissant de leur propreté et du bon ton
      des navigateurs policés dont les réflexions
      étaient profondes et claires comme le désert marin.

      À ceux lui demandant des choses sur la chair,
      Confucius dit : la vôtre est pareille à l’autre
      et la mienne à la vôtre ; le sens de ceci est clair.

      Puis il regarda en souriant son cercueil.

      J’aime

Répondre à ben Annuler la réponse.