Silicon Valley (6) Le Pitch parfait

J’ai assisté à une séance passionnante, dans une chambre du commerce de Palo Alto. Magali m’invitait à assister à cet exercice, où elle se rendait pour « faire du réseau ». Magali était une ancienne journaliste pour la BBC avant de créer son entreprise de conseil en communication. L’un des nombreux « incubateur de startups » organisait un concours de présentations de projets, en technologie écologique, dont le gagnant gagnerait 500 000 dollars d’investissement. Un cabinet  invitait Magalie à se rendre à un après-midi de répétitions, pour évaluer et conseiller les jeunes entrepreneurs.

Un étudiant chinois devait faire une présentation de dix minutes pour présenter un projet extraordinaire de transformation industrielle de déchets plastiques en carburant. Grâce à des réacteurs très sophistiqués, les déchets se transforment en naphta, en diesel et en carbon black.

La pierre philosophale, quoi.

Autour de la table, des professionnels de divers horizon, et un touriste, moi, qui ne sait comment se tenir. Le jeune Chnois vient de Hangzhou et devant lui, des coaches et des grands spécialistes de choses très obscures. Tout le monde se présente en un bref tour de table. Magali ne perd pas la face et me présente comme un écrivain qui a longtemps vécu en Chine, et comme un universitaire qui a enseigné à l’université Fudan. Au nom de Fudan, tous les Chinois de la salle opinent du chef en me regardant, visiblement impressionnés. Bravo Magali. En bonne communicante, elle a su trouver les mots pour faire passer un sage précaire en personnalité éminente.

A côté de moi, un homme repoussant de laideur, des croûtes sur le visage et un sourire carnassier. Une voix caverneuse et un accent yiddish. Il dit être un militaire israélien, pilote de chasse et retraité de l’armée de l’air de Tsahal. Je ne comprends pas ce qu’il fait là. Apparemment, il s’est reconverti dans le consulting.

L’étudiant fit une démonstration peu convaincante mais il avait l’air de savoir de quoi il parlait. A mon avis, pour un investisseur, le plus important dans un tel projet, ce n’était pas le charme dégagé par le présentateur du projet, mais le sérieux de l’entreprise, sa faisabilité et sa fiabilité scientifique. Les conseils fusèrent, et on suggéra au jeune homme de raconter une « histoire » plutôt que de nous expliquer le processus scientifique. Il fallait donner une impression plus dramatique, et moins insister sur les aspects techniques, auxquels personne ne comprenait rien.

Le but pour chacun des participants à cette séance, était de s’associer à de toute petites entreprises, à les aider bénévolement afin qu’à terme, quand elles deviendraient riches, ils puissent toucher les dividendes de cette aide précoce.

Une dame est arrivée en retard. Quand elle s’est présentée, j’ai compris que tout le monde mentait autour de la table. Que tout le monde prétendait travailler, prétendait être professionnel, mais que la plupart était en train de se la raconter. A part l’étudiant chinois, qui croyait peut-être à son histoire de machine écologique, chacun faisait semblant de maîtriser quelque chose.

Le vieil Israélien, en revanche, était toujours pertinent. Chaque fois qu’il prenait la parole, toute l’assemblée se taisait et écoutait. Magali devait partir dès que possible. Elle voulait montrer au juriste organisateur de l’événement, qu’il ne fallait pas abuser de sa bonne volonté.

Dans la voiture du retour, je lui ai conseillé de s’associer au vieil Israélien. « Alliance de la jeunesse et de l’expérience, de la beauté et de la laideur, vous feriez des étincelles tous les deux. »

Un commentaire sur “Silicon Valley (6) Le Pitch parfait

  1. Une princesse avec un épouvantail ?

    Nous pensons aussitôt à la légende intitulée «La Belle te la Bête»

    «Le monstre se fit entendre. Un bruit effroyable, causé par le poids énorme de son corps, par le cliquetis terrible de ses écailles et par des hurlements affreux, annonça son arrivée. En voyant approcher la Bête, qu’elle ne put envisager sans frémir en elle-même, la Belle avança d’un pas ferme, et d’un air modeste salua fort respectueusement la Bête. Cette démarche plut au monstre. Se retournant vers la Belle, il lui dit : Bonsoir, la Belle.»

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