Nous avons quitté Ftiss et les parents d’Hajer dans les larmes et l’affection. J’ai essayé de leur faire comprendre, à tous, combien j’avais mesuré et apprecié les efforts qu’ils avaient fournis pour le confort de notre séjour. Ils m’ont donné une leçon d’humilité et de générosité.
Dans le ferry du retour en Europe, j’étais si fatigué que j’ai brisé l’une des vitres arrières en maneuvrant la voiture à une heure du matin.
En Italie, nous avons pris le temps de nous arrêter à Rome où, pour la première fois, le sage précaire a joui de la ville éternelle. Auparavant Rome m’avait laissé froid car trop imposante pour mes capacités de jugement. Grâce à Hajer qui me traita de snob et qui sut me convaincre de suivre les troupeaux de touristes, j’ai lâché prise, sacrifié aux rituels à la con des selfies Fontaine de Trevise ou Colisée. Je fis mon deuil de Rome quand soudain des émotions esthétiques m’assaillirent à la vue du Mont Palatin, de telle colonne antique, d’un tableau du Caravage exposé dans telle église.
En acceptant d’être un simple consommateur qui suit le flot des touristes, j’ai expérimenté une suite d’épiphanies proustiennes. J’allais dire stendhaliennes mais c’eût été vraiment snob.
De retour en France, nous préparâmes notre aventure suivante et notre nouveau départ.
Hier nous sommes partis de chez pour notre nouvelle ville en Allemagne. À Grenoble, nous fîmes une pose et ce devait être notre dernier jour en France. Hélas, des voleurs brisèrent une vitre de notre voiture et dérobèrent plusieurs bagages dans lesquels se trouvaient nos ordinateurs et des papiers importants. Ils volèrent aussi une valise de vêtements féminins. Curieusement, ils laissèrent la vieille guitare et les vêtements du sage précaire.
J’écris ces lignes à l’hôtel de Police de Grenoble, dimanche 10 septembre, pour déposer plainte. Sera-ce vraiment notre dernier jour en France ?