J’ai arrêté de boire en 2016 mais ce n’était ni grâce à une prescription médicale ni un interdit religieux. C’était pour faire plaisir à la femme que j’aime et qui ne pouvait pas supporter l’idée de vivre avec un homme qui buvait. Ce n’était pas négociable.
Nous nous sommes donc disputés plusieurs fois sur ce sujet car je pouvais arrêter l’alcool au quotidien, mais il était malsain à mes yeux d’interdire toute consommation, même un bon verre, parfois, en compagnie familiale, autour d’un bon repas.
Nous avons commencé à vivre ensemble sans que je promette la sobriété totale. Je me réservais le droit de boire sous certaines conditions.
Puis j’ai décliné de moi-même des propositions qu’en d’autres temps j’aurais trouvées alléchantes. Petit à petit, sans m’en rendre compte, je devenais sobre. Même en famille, même avec mes vieux amis, je ne buvais plus que de l’eau.
J’étais fier aussi, je le confesse, de dire que je faisais ce sacrifice pour la femme de ma vie. Dans un recoin de mon esprit, je trouvais cela romantique.
La réalité est que la sobriété est comme une barrière, et chacun vit d’un côté ou de l’autre de cette barrière. Depuis que je suis sobre, je ne vais pas mieux car je n’ai jamais souffert d’alcoolisme, ni attrapé de maladies causées par l’alcool. En revanche j’ai ouvert les yeux sur les méfaits de ce fléau dans nos sociétés et suis étonné de la tolérance avec laquelle notre société appréhende cette drogue.
Il ne fait pas de doute que les lobbies des alcooliers, représentant les intérêts des producteurs, des diffuseurs et des débits de boissons, corrompent nos politiciens pour les empêcher d’adopter des mesures qui protègeraient les populations les plus touchées.
Et pendant ce temps, nos compatriotes musulmans vivent en famille et font la fête sans alcool. De ce point de vue ils ont beaucoup de choses à nous apprendre, je m’étonne que personne n’en parle dans les médias. Ce pourrait être un angle d’attaque pour tenter un rapprochement entre plusieurs segments du peuple. Qui ne voit qu’il y a là l’opportunité d’apprécier et de valoriser le mode de vie de ceux qui sont d’ordinaire stigmatisés ?
Si on avait envie de s’intégrer les uns et les autres dans une nation fraternelle et en bonne santé, on pourrait commencer en demandant aux musulmans comment ils font pour être aussi gourmands sans alcool.