Promenade dominicale au musée

Le dimanche à Munich, plusieurs très beaux musées baissent leur prix à un euro le ticket d’entrée.

Comme les musées sont équipés de cafés, et qu’il pleut certains dimanche, c’est le lieu idéal pour se donner rendez-vous avec des amis.

On se voit, on est fringants, on est jeunes et beaux, on se balade avec légèreté dans le musée d’arts anciens, Alte Pinakothek en allemand, sans s’apesantir sur les merveilles impressionnistes car ce n’est pas la première fois qu’on fait cette visite.

Sans être un snobisme exactement, la sagesse précaire s’y connaît un peu et n’a pas trop de leçon à recevoir de personne, si vous voyez ce que je veux dire.

On fait une pause au café et on rigole pendant une heure. Avant de partir pour se cuisiner un petit quelque chose, on traverse tranquillement les salles qui vont du Moyen-âge jusqu’au XVIIIe siècle. Chacun à son rythme et avec l’aisance que la sagesse précaire partage avec les héritiers bourgeois.

Pierre Bourdieu parle d’un rapport « docte » au savoir pour les classes populaires, alors que la bourgeoise aurait un rapport « mondain » à la culture. Le conservateur du Musée d’art contemporain de Lyon, quand j’y travaillais, disait que lui-même qu’il n’avait que mépris pour les artistes et qu’il admirait les universitaires.

Le sage précaire, lui, entretient un rapport amoureux avec les musées et les arts. Il profite de son statut d’homme sans travail, sans héritage et sans héritiers pour passer entre les lignes des doctes et des mondains.

Allemagne et Italie

Un tableau d’un romantique allemand montre deux femmes amoureuses l’une de l’autre. Le sens politique souligne plutôt l’amitié entre les peuples mais le sage précaire y décèle une tension lesbienne. Le tableau date des années 1820 et il est très prude. L’une des deux femmes est timide, un peu froide. L’autre est plus libérée, plus passionnée, et cherche à séduire la première. Toutes deux sont habillées à la mode Renaissance italienne, genre quattrocento baba cool.

Le titre du tableau : Italia und Germania. Une façon pour le romantique allemand de dire que l’Allemagne et l’Italie sont deux nations soeurs, proches et attirées l’une par l’autre. Je souriais dans ce gros musée d’art classique, la Alte Pinakothek de Munich. Je peux me tromper, mais selon moi, la femme qui symbolise l’Allemagne est une jolie brune un peu réservée, un peu timide, et elle est sur le point de céder devant l’insistante passion de la fougueuse séductrice italienne.

Je me suis trompé. La lecture du cartel explique le contraire. Je mets en ligne une reproduction de l’image pour que vous vous fassiez votre opinion.

Mon interprétation : l’Italie insuffle à l’Allemagne la vie des sens et de la chair. L’Allemagne se tient prête à devenir la prochaine grande nation culturelle de l’Europe. Il y a eu la Renaissance italienne, et l’Allemagne romantique prend le relais.

Erreur, il fallait être moins compliqué : l’Allemagne est symbolisée par la jeune fille blonde et l’Italie par la jeune brune.