Une amie m’avait d’un texte qu’il était extrêmement « rapide ». C’était un texte que j’avais écrit pour rire, plus ou moins une commande, et surtout une occasion de connivence avec mes compagnons de pub, puisque j’habitais à Dublin à cette époque. « Connivence », si je ne me trompe, c’est le thème du numéro de la revue Lieu-dit qui l’avait publié six mois plus tard.
Mon amie avait été la seule à parler de rapidité dans le style, et cela m’a marqué depuis ce jour. Personne d’autre ne m’avait dit cela, sauf la Japonaise à qui mon amie avait parlé : « Ah, Liam, il paraît que tu n’écris pas si mal ? On m’a dit que c’était très rapide ! »
C’était très mystérieux car mon texte ne comportait pas de phrases courtes, qu’il était très musical à mes oreilles, comme une chanson populaire. Comme mon texte était une forme d’hommage à mon amie Hélène avec qui nous chantions des tubes parisiens des années 30, mon phrasé était volontairement balancé, comme une valse.
De plus, c’était largement un texte descriptif. En rien une nouvelle d’action. C’est pourquoi j’étais très charmé à l’idée que mon amie y perçût de la vitesse.
Cette vitesse s’obtient quand tu mets en places les bonnes isotopies, autrement dit, quand la cohérence au niveau du sens rejoint la cohésion en matière de syntaxe et de style.
Le texte, étant bien structuré, se lit sans effort, comme un aliment bien préparé se laisse manger dans le pur plaisir.
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Y a-t-il une difference entre un texte « lu sans effort » et un texte « rapide »?
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Oui, je pense qu’il y a une différence, mais j’aime beaucoup l’idée selon laquelle l’adéquation de la syntaxe à la sémantique augmente le coefficient de rapidité. Je vais vérifier chez Gérard Genette s’il n’aurait pas parlé de quelque chose d’équivalent. Dans Figure III (Seuil, 1972), il décompose le récit en des instances telles que l’ordre, la durée, la fréquence, le mode et la voix. Franchement, s’il n’y a pas la place là-dedans pour l’isotopie à la Cochonfucius, ou à la vitesse, c’est que je n’y connais rien.
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Citation :
La vitesse du récit se définira par le rapport entre une durée, celle de l’histoire, mesurée en secondes, minutes, heures, jours, mois et et années, et une longueur: celle du texte, mesurée en lignes et en pages. Théoriquement, en effet, il existe une gradation continue depuis cette vitesse infinie qui est celle de l’ellipse, où un segment nul de récit correspond à une durée quelconque d’histoire, jusqu’à cette lenteur absolue qui est celle de la pause descriptive, où un segment quelconque du discours narratif correspond à une durée diégétique nulle.
G. Genette, Figures III
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Merci pour cette citation, Cochonfucius. Tu n’aurais pas la page, par hasard ?
Je note, de mon côté, que le texte dont je parle dans mon billet était plutôt descriptif, et que de ce fait, il appartenait plutôt à ce que Genetter appelle la « lenteur absolue qui est celle de la pause descriptive ». What a paradox!
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Je n’ai pas la page, j’ai trouvé ça
http://www.trusiad.fr/cours/litterature/recit.html
dans un cours de narratologie.
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Malin, ce Cochonfucius. Rusé comme un cochon chinois.
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Confirmé par
http://www.google.com/search?q=%22the+wisest+of+old+pigs%22
une recherche ciblée.
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