Dans cette vidéo, les secousses infimes viennent des mouvements intérieurs de mon corps. J’ai posé la caméra sur un livre, lui-même placé sur mon torse. Les rythmes du graphisme de Michaux sont donc redoublés des rythmes de mon coeur.
L’imaginaire enfoui d’un homme défile devant nos yeux, imaginaire capté et mis en brochette. Ni abstraits ni figuratifs, ces dessins font penser à des lettres, des idéogrammes, des signes, des animaux, des insectes. Comme dans les manuels de chinois, des passages sont créés entre des actions d’hommes et des signes. Parfois, ce sont les signes qui redeviennent actions et choses. Michaux se promène à la lisière du sens et de la matière, de l’écrit et du visuel, de l’incorporel et des corps.
On pense à des images de cauchemar, à des dessins de fous, d’enfants, de drogués. On pense à des peintures rupestres, à des classifications d’histoire naturelle, à des alphabets de peuples anciens, à des mouvements de danse.
Dès la première page, l’influence de la culture chinoise se fait sentir. Le trait qui rappelle le chiffre 1 du mandarin, mais aussi les signes posés en lignes, dont l’illettré ne sait s’ils se lisent à l’horizontale ou a la verticale. Si certaines pages sont des lignes horizontales, d’autres s’appréhendent en colonnes, commes les poèmes de chinois classique. Michaux utilise son illettrisme en art.
Lévi-Strauss raconte, dans Tristes tropiques, qu’un chef Nambikwara prit un stylo et traça des lignes compliquées qui ressemblaient à l’écriture de l’ethnologue. Ce dernier faisait semblant de comprendre, et, devant les membres du village impressionnés, le chef montrait qu’il possédait le pouvoir magique du Blanc. Il avait transformé son illettrisme, il n’était plus tout à fait illettré.
Michaux fait de nous des illettrés. Il nous ramène à l’état d’enfance, où nous pratiquions la lecture sans savoir lire. L’époque où nous regardions les images, et suivions les lignes d’écriture du doigt en prétendant savoir ce qu’elles racontaient.
Il es question de rythme
http://neigeauprintemps.canalblog.com/archives/2010/07/09/18539256.html#comments
chez notre camarade Neige…
J’aimeJ’aime
C’est très vrai, Cochonfucius. Espérons pour elle que « la traduction et le rythme » ne soit pas trop casse-gueule.
J’aimeJ’aime