Journal d’Eponge pressée

J’ai beaucoup parlé de Sigismond, il n’est que justice que dorénavant, ce soit lui qui parle de sa propre voix. C’est donc avec plaisir que j’annonce publiquement, et avec retard, le lancement de son blog japonais.

Sigismond, c’est le nom que je lui ai donné dans mes billets de blog depuis 2005, parce qu’il me fallait un nom plus médiéval que Serge. Mon ami est moins médiéval, en fait, qu’il n’est romantique, donc Sigismond est le nom d’un héros médiéval dans un drame romantique, comme Siefried, Tristan ou Roland.

Sigismond était un copain, en Chine, avec qui j’ai fait de nombreux gueuletons. Il possédait l’art de commander les bons plats, les bonnes associations de plats, ce qui est reconnu par les Chinois comme un talent digne de respect.

Mais nous ne mangions pas que dans des restaurants. Nous avions l’habitude, aussi, de déguster des brochettes d’agneau, sur des tabourets en bord de route, en avalant des bières Tsinghai, ou Jiling. Ces rencontres nocturnes, où nous parlions littérature, devinrent relativement populaires, car d’autres collègues se joignaient à nous certains soirs.

Nous qui étions un peu marginaux dans le monde des professeurs de français langue étrangère, nous avions créé là un petit salon littéraire qui représente le plus grand succès social dont nous avons jamais été capables.

Sigismond, pendant très longtemps, écrivait mais rechignait à ouvrir un blog. Comme beaucoup de littéraires, il jugeait sévèrement cette forme de publication. Dieu soit loué, il s’y est mis, depuis le Japon où il habite présentement. Son blog s’intitule Journal d’Eponge pressée et il apparaît dans les liens recommandés par La précarité du sage.

Ce qu’il fait au Japon, c’est toujours un mystère pour moi, car Sigismond peut vous expliquer des choses longuement sans que la clarté soit faite sur les aspects concrets et, disons, sociaux de l’affaire. On en sait plus sur les affres de la langue, les étirements linguistiques et identitaires qui l’habitent, que sur ses activités professionnelles ou ses projets d’avenir.

A un moment donné, il m’a semblé qu’il se lançait dans une thèse de doctorat sur la rhétorique japonaise, il était déjà avancé dans ses recherches, puis il m’a semblé que cette thèse s’était volatilisée. Elle reviendra peut-être sur le tapis, sous une forme différente, comment savoir avec Sigismond ?

Sigismond me fait penser à ces héros de romans chinois picaresques. Toujours insaisissable, il peut rester cloîtré des jours entier en étudiant des choses arides, puis on peut le déclarer disparu : il a soudain traversé des déserts et il saute comme un singe sur des montagnes abruptes. Il peut garder le silence des semaines entières, et quand cela lui chante, nourrir des amitiés cordiales avec des sages précaires volubiles. C’est ce que j’appelais chez lui le principe de fermeté.

Sigismond est sans conteste la personne qui m’a le plus inspiré quand j’étais en Chine. Il y a quelque chose chez lui d’à la fois rigide et malléable, comme ces blocs dont on fait les sculptures, qui se prête infiniment à la narration. Dès que Sigismond sort de sa caverne, le sage précaire voit apparaître des histoires et des prodiges.

Ce blog est une sortie partielle de la caverne, et gageons qu’il y sortira des prodiges.

7 commentaires sur “Journal d’Eponge pressée

  1. Il y’a beaucoup à dire sur ce billet. D’abord ça fait plaisir d’avoir des nouvelles de Sigismond qui est c’est vrai un sacré personnage et son blog est très intéressant, très riche du peu que j’ai lu ; l’un de ses billets m’a scotché sur l’individualisme du professeur de langue seul dans sa classe quelque chose comme çà, c’était trés juste, trés finement observé , je n’ose pas cependant lui écrire un commentaire comme ici, je ne sais pas si il apprécierait et aurait la patience comme le sage précaire de supporter mes blagues de potaches commentateurs reloud, il m’intimide un peu aussi, j’avoue.
    Juste une question comme çà puisqu’on parle de thése : il en soutient une finalement ou quoi? et toi au fait c’est pour bientôt il me semble non ? A+

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  2. « Moyen-ageux », c’est un peu le mot, oui. C’est drôle c’est une des rares chansons de Brassens que je ne connais pas très bien; que je ne joue pas à la guitare…

    François, il t’impressionne Sigismond? Sacré François et sacré Sigismond. Tu ne devrais pas hésiter à mettre des commentaires sur son blog, ça lui ferait plaisir.

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