Vers l’Aigoual de nuit

Soleil levant depuis le col de l’Homme mort

Réveillé à 3 heures du matin, je prépare mes affaires pour partir en randonnée autour de 4h00. Eclairé par une lampe de poche, je monte vers la crête. Je veux relier le mont Aigoual depuis le terrain, en longeant la crête.

J’avais déjà marché jusqu’à l’Aigoual, mais à chaque fois depuis Valleraugue, par le fameux sentier dit des « 4 000 marches ». L’ennui des 4 000 marches, on le sait, c’est son dénivelé un peu abrupt, et c’est le fait qu’il faille prendre la voiture pour s’y rendre. Partir de chez soi, c’est plus long et plus facile en même temps.

Ce matin, je n’ai qu’à me rendre au col de l’Homme mort, ce que j’ai fait mainte fois, et à longer la crête jusqu’au sommet des sommets, le mont des monts. C’est une longue promenade, et comme j’évalue mal les distances et les durées, je pars le plus tôt possible. Mes insomnies passagères me sont d’une aide certaine. Habitué à être éveillé à trois heures, c’est très en forme que je pars sur les chemins à quatre heures.

Les étoiles tapissent le ciel comme une herbe de cristaux. (J’essaie de faire mon Giono, mais à la relecture, ce n’est pas convaincant.)

Heureusement que je connais parfaitement l’itinéraire car, un an plus tôt, je me serais immanquablement égaré dès les premiers mètres hors du terrain. Mes pas s’enchaînent dans le faisceau lumineux de ma lampe et j’arrive à Puech Sigal dans une étrange fatigue.

Le chemin repart vers le col, et il est beaucoup, beaucoup plus long que les autres fois où je l’ai emprunté. Il est même interminable. Comment ai-je pu considérer que le col de l’Homme était facilement accessible ? Plus jamais je ne dirai cela. Atteindre le col de l’Homme et revenir au terrain constitue une vraie grosse randonnée, que le retour se fasse par le col de Bonperrier ou par celui de l’Asclier. Ou même que l’on décide de revenir sur ses pas.

Les Grandes Jasses est un lieu dit plat, une prairie ou un clairière où paissent les moutons avant les transhumances, et une table de piquenique. Je m’allonge sur la table, la bouteille d’eau pour oreiller, et je regarde les étoiles. Je suis épuisé. Le spectacle des étoiles me calme, comme d’habitude. Soudain, une énorme étoile filante. Les yeux grands ouverts, je suis aux aguets. C’est vrai que nous sommes en août. Je collectionne les étoiles filantes et les objets volants traversant le ciel.

Il est 5h30 quand je reprends la route. Je me promets de ne m’arrêter qu’à la hêtraie, ce qui est d’une bêtise rare, et qui montre que je ne suis pas aussi habitué que je le prétends à ce chemin. Quitte à être si près du col, autant ne pas s’arrêter si près du but. Au pied d’un hêtre fabuleux, et près d’un tronc compliqué comme un éléphant, je m’allonge et m’endors.

Quand j’atteins le col de l’Homme mort, le soleil levant me prend par surprise. Je n’avais pas pensé une seule seconde à ce simple fait que le soleil se levait et que j’étais en droit d’y assister.

2 commentaires sur “Vers l’Aigoual de nuit

  1. Je ne sais point à quoi comparer le soleil ;
    J’aime, en un frais matin, rêver sous sa lumière
    Et le voir décliner à son heure dernière…
    Au petit jour il semble abriter mon sommeil,

    Ou bien me consoler de rester en éveil,
    Car la chose pour lui est simple et coutumière :
    D’Est en Ouest il lui faut franchir la Terre entière,
    Brillant au firmament d’un éclat sans pareil.

    Sans lui, que saurions-nous de la beauté du monde,
    De l’univers bizarre où la magie abonde,
    Où l’heure est annoncée par les corbeaux tordus ?

    Sans lui, on y verrait comme dans un tunnel,
    Comme dans la noirceur du froid originel,
    Tâtonnant devant nous, tels des enfants perdus.

    J’aime

Votre commentaire

Entrez vos coordonnées ci-dessous ou cliquez sur une icône pour vous connecter:

Logo WordPress.com

Vous commentez à l’aide de votre compte WordPress.com. Déconnexion /  Changer )

Image Twitter

Vous commentez à l’aide de votre compte Twitter. Déconnexion /  Changer )

Photo Facebook

Vous commentez à l’aide de votre compte Facebook. Déconnexion /  Changer )

Connexion à %s