Viol de Nankin (1), d’Iris Chang

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Je ne savais pas que Le Viol de Nankin était un livre si récent et si important au regard de l’histoire. Je l’avais vu en version anglaise dans l’édition de poche de Penguin, dans une bibliothèque vieillotte, et je l’avais immédiatement classé parmi les classiques à lire un jour.

Je ne savais pas non plus qu’il n’avait été traduit en français que récemment. Comment a-t-on pu attendre ? Preuve supplémentaire que la Chine, son histoire récente, intéresse trop peu les Français.

En fait, il s’agit d’un livre paru en 1997, écrit par une Américaine d’origine chinoise dont les grands-parents avaient réussi à fuir Nankin avant que les Japonais ne la mettent à sac. Une femme qui, pour la conception de son ouvrage, a combiné les méthodes américaines du journalisme historique et la méticulosité nationaliste des Chinois. Mêlant une énergie effroyable dans l’accumulation des données, à un angle de vue étroit et hégémonique, elle a construit un livre qui a pour but de rester dans l’histoire. Un livre qui impose sa présence parce qu’il n’a oublié aucun aspect de ce qui fait un grand livre, selon ce qu’on enseigne dans les universités américaines.  

Personne avant elle n’avait réuni tant d’informations, de témoignages, de lectures, de talent d’écriture, pour qu’un événement échappe à l’oubli.

Enfin, elle l’a écrit comme une œuvre littéraire. Non pas un roman, pas une fiction, mais un essai écrit dans un souci de construction esthétique qui aboutit à l’effet le plus poignant possible. L’effet recherché est celui d’une tragédie, qui remue le lecteur dans ses fondations morales et esthétiques.

Alors qu’elle dénonce amplement les Japonais pour leurs crimes, c’est d’un Japonais qu’elle s’inspire pour la construction de son ouvrage. Le cinéaste Kurusawa lui fournit donc la méthode narrative pour raconter le grand massacre de Nankin. Comme dans le film Rashomon, le récit raconte le même événement selon les points de vue des victimes, des bourreaux et des étrangers.

Quelques années après avoir écrit cette plongée dans l’horreur de 1937, Iris Chang s’est donné la mort en Californie.

3 commentaires sur “Viol de Nankin (1), d’Iris Chang

  1. Merci pour ce billet et cette invitation à la lecture d’Iris Chang. Aux yeux de ce compte rendu de ce -sans doute- trés beau livre j’ai un peu honte maintenant des joies que j’ai pu avoir lors de mon séjour nankinois.Je ne devrai pas je sais mais c’est ainsi.

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  2. Oui, moi aussi, le retour sur ces événements de 1937, que je n’ignorais pourtant pas quand j’habitais à Nankin, me fait un drôle d’effet. Je ne regrette rien des plaisirs que j’ai eus, mais je m’étonne de m’être si peu intéressé à cet aspect, omniprésent, de la ville.
    En revoyant mon blog Nankin en douce, je m’aperçois qu’il n’y a même aucune catégorie sur l’histoire. Pour moi, Nankin c’était soit l’histoire ancienne et la culture classique, Le Rêve dans le Pavillon Rouge, l’opéra Kun, etc., soit l’histoire hyper récente.

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  3. Moi je me demande une chose, puisqu’on parle shoah et religion en ce moment : que penserions nous si disons une bande de jeunes américains en vadrouille en Europe aller faire des feux de camp (c’est le cas de le dire) la guitare a la main,en train de faire joyeusement les cons à la découverte de l’Europe à jouer les Kerouack avec leurs récits de voyage sur leurs blogs et leurs photos, de refaire le monde jusqu’a tard dans la nuit , rire, parler gueler fort etc…… en Pologne à proximité de Trebllinka, Aushcwitz ou alors à deux pas des tranchées de Verdun… on serait vite scandalisé non ou plutôt trés trés géné en tout cas ? n’est ce pas ce que nous avons fait chez les Chinois version européenne a Nankin (toutes proportions gardées c’est bon parfois de faire le con quand on part en voyage – les français à l’étranger sont d’ailleurs devenus célèbres grace à ça , mais c’est pour mettre un peu de sel dans le débat…) ???!! Moi je ne renie rien et ne regrette rien aussi, c’était une expérience extremement enrichissante mais c’est vrai que la jouissance du voyageur dans une ville comme Nankin qu a connu une telle tragédie est vite teintée d’amertume, fait « bizarre » quand on y pense. Evidemment j’exagére mais pas trop en même temps…

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