En compagnie de 3 copains , libérés en même temps que moi des obligations militaires, je débarque à Paris, tout excité par cette nouvelle vie qui commence. Les uns reprennent leurs études , l’autre son métier. Ce dernier me propose de me faire entrer dans sa boîte comme aide magasinier, vous savez , ce fameux métier que j’ai pratiqué à l’armée… Je décline l’offre, car j’ai envie de découvrir d’autres horizons. Et puis , à cette époque , nous sommes en plein dans les « trente glorieuses », et le travail ne manque pas. Mais je ne me précipite pas pour en trouver , je veux d’abord m’imprégner de cette ville que je ne connais pas.
Je me baguenaude la journée entière et découvre avec émerveillement bâtiments et sites célèbres. J’espère toujours rencontrer des gens connus, ce qui m’est arrivé 2 ou 3 fois . Je trouve à me loger dans une chambre d’un hôtel douteux mais pas cher , dont la patronne , Hélène , a une jambe de bois ! Me voici donc un vrai Parisien , avec une vraie adresse à Paris et pas n’importe où : dans le Marais, le ventre de la capitale. J’habite au 4, rue des blancs manteaux dans le 4ème arrondissement. Je côtoie des gens bizarres dans ce quartier . Je découvre un autre monde cosmopolite fait de trafics divers , de prostitution , de proxénétisme . Tout semble louche . Je découvre que ma résidence est un hôtel de passe. Dans ce milieu interlope , je suis un peu perdu et en même temps ravi ! Hélène devient un peu la protectrice de ce jeune homme naïf et inconscient que je suis . Quand elle a trop bu , ce qui n’est pas rare , elle me raconte sa vie , ses illusions perdues , son « Paname », et elle pleure ! C’est émouvant comme une chanson d’Edith Piaf .
Ces quelques mois passés ici resteront parmi les meilleurs souvenirs de mes 20 premières années. J’y aurai découvert la chaleur humaine , l’entraide , la qualité des échanges basée sur la confiance. Beaucoup plus que le séminaire et l’armée réunis , cette période aura été un bel apprentissage de la vie et des vraies valeurs ! Quelques années plus tard , j’ai souhaité faire partager à Marie-Pierre cette tranche de vie. Hélas , tout le quartier avait été rasé , et nous n’avons pu retrouver la trace d’Hélène.
Fin de la séquence émotion.
A cette époque , Paris vivait au rythme des manifestations pour la paix en Algérie et des contre manifestations de l’O.A.S.. Il y eut les morts du métro Charonne , les accords d’Evian et l’indépendance de l’Algérie, les attentats contre le Général. Youri Gagarine s’envolait dans l’espace, brûlant la politesse aux Américains . Johnny chantait et tout le monde twistait. On commençait à entendre parler des Beatles. Et moi , je me décide à chercher du boulot. J’achète France-Soir et me plonge dans les 3 ou 4 pages d’annonces d’offres d’emploi . J’en repère une qui propose un bon salaire pour vendre des aspirateurs révolutionnaires… ça peut être amusant et rémunérateur .
J’ai rendez vous demain chez Tornado .
Tornado!
Un nom de cheval de western…
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