Ceux qui aiment la France voteront à gauche

On a vu ce qui s’est passé tout le long des élections européennes. Une bonne partie de la France cherche à criminaliser la gauche. Et pour criminaliser la gauche, on s’en prend à son chef le plus charismatique, Jean-Luc Mélenchon. Donc on tape sur lui, abondamment, de tous côtés. Les gens disent qu’il est un frein, qu’il est un poids, qu’il est un repoussoir. Ce qui n’est pas complètement faux pour des personnes âgées surtout. Mais il est un repoussoir aussi parce qu’il concentre toutes les attaques sur lui.

S’il se retirait de la lumière, étant donné que la classe médiatique a très peur de la gauche, et qu’elle est organisée contre un projet de rupture, elle concentrerait exactement la même intensité de l’attaque sur différents sujets, sur le leader suivant. Ça pourrait être n’importe qui. Et d’ailleurs, si Mélenchon se retirait, la plus grande probabilité est que les chefs se retrouveraient à nu et ne trouveraient pas de point d’entente. Marine Tondelier serait incapable de s’entendre avec M. Faure, qui serait très agacé par M. Roussel, et qui serait à son tour radicalement opposé à M. Bompard ou Mme Pannot. Et ils ne trouveraient pas de point de ralliement.

Depuis 2022, et pour la première fois depuis longtemps dans l’histoire de la gauche, l’ensemble des partis de gauche se mettent d’accord sur un programme. C’est déjà extraordinaire. Ils passent des accords électoraux, et s’ils font campagne sans leader, eh bien c’est rafraîchissant.

Mais ceux qui aiment la France voteront pour eux.

Des collusions avec des puissances étrangères

D’un pur point de vue géopolitique, tous les partis en place ont des connivences avec des étrangers, mais c’est le front de gauche qui présente le moins de prises à l’argument de collusion avec l’ennemi. D’un côté, nous avons des soutiens du président russe Vladimir Poutine, qu’on trouve surtout à l’extrême droite. D’un autre, on trouve des soutiens inconditionnels à Israël, beaucoup présents au RN, chez les Républicains et dans le bloc centriste. On en trouve aussi quelques-uns dans les appareils de partis affiliés au centre gauche, mais ils ne pèsent pas très lourd dans la dynamique du bloc populaire.

Le gros des forces de gauche, pour essayer de faire contrepoids, est accusé d’être antisémite et d’aimer le Hamas plutôt que d’aimer la France. Or, il n’y a jamais eu de soutien inconditionnel au Hamas. On a essayé de lier la France insoumise au Venezuela, disant que Mélenchon serait Chavez, une comparaison faite par le philosophe Raphaël Enthoven, lorsqu’il a dit qu’il voterait pour l’extrême droite plutôt que pour la gauche, révélant ainsi sa vraie nature. Il a préféré Marine Le Pen à Jean-Luc Mélenchon, « Trump à Chavez », montrant par là qu’il serait prêt à accepter que la France se donne au néofascisme, du moment qu’on laisse Israël commettre le nettoyage ethnique en regardant ailleurs.

Cette histoire de Venezuela était une blague. Personne n’a jamais cru qu’un parti de gauche était vraiment sous l’influence d’un pays d’Amérique du Sud. Comparé au lien évident entre la Russie et l’extrême droite française, il n’y avait jamais eu de lien de subordination concret. Au contraire, les pays d’Europe orientale favorisent la montée de l’extrême droite en France, depuis des années. La presse révèle même que des membres du RN (ou proches du RN) sont payés pour produire de la propagande pro-russe.

La soumission à l’État d’Israël est une chose différente mais tout aussi grave, car on trouve des personnalités jusqu’à la tête de l’Assemblée nationale qui déclarent leur soutien inconditionnel à ce pays. On assiste à un vrai problème de loyauté. C’est pourquoi la critique à la France insoumise et à Mélenchon est si dure et intense aujourd’hui. L’accusation d’antisémitisme est infondée, mais elle se comprend car il existe un petit nombre de personnes très influentes dans les médias et les lieux de pouvoir pour qui il ne faut pas toucher à Israël. Si on défend le droit des Palestiniens, cela les rend extrêmement nerveux. Le fait que l’on ose dénoncer un génocide en cours commis par les Israéliens rend cette communauté nerveuse.

Il ne s’agit pas que de personnes de confession juive, mais aussi de catholiques, protestants et même des musulmans pro-Israël. C’est une option politique, un soutien total à Israël, quelque chose d’épidermique. Comme ils n’ont pas d’arguments face à ceux qui défendent la Palestine, ils les traitent d’antisémites. Et pour convaincre les Français, ils composent des plateaux télé du matin ou soir avec des intervenants répétant en boucle les accusations. La réalité est qu’il n’y a pas vraiment d’antisémitisme parmi les militants du Front Populaire, et c’est chez eux que l’on trouvera plutôt des gens qui veulent défendre la France.

C’est la raison pour laquelle la sagesse précaire, qui est un patriotisme mou et un libéralisme solidaire, préférera donner comme consigne d’aller voter au second tour pour les candidats du Front Populaire.

9 commentaires sur “Ceux qui aiment la France voteront à gauche

  1. Bonjour,

    Quel texte! Pourtant je le trouve trop court et très partiel.

    Mais alors qui est inféodé aux USA? Qui est ultra Libéral?

    le problème n’est il pas que l’identité?

    Un lot de question de la part d’un très modeste patriote citoyen triste de voir son pays aller ainsi.

    Arnaud

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    1. « Patriotisme mou ». Je ne suis pas sûr que l’amour, même mou, de la France, conduise à voter à gauche. Au contraire, le patriotisme conduit plutôt à voter à droite et à l’extrême droite. Si j’aime la France, je veux qu’elle reste comme elle est, qu’elle conserve son identité. Je ne tolère la diversité culturelle que dans la mesure où elle me rappelle la grandeur de l’Empire. De ce point de vue, en matière internationale, un rapprochement avec d’autres peuples également identitaires comme le peuple russe ne pose pas de problème, ce qui en pose c’est une intégration internationale comme l’Europe dans laquelle la France perd une part de sa souveraineté.

      Le patriotisme, même mou, conduit à voter à droite, pas à gauche. Si on veut voter à gauche, ce n’est pas par patriotisme, c’est parce qu’on ne veut pas qu’il y ait de différences de droit entre un français de souche et un français d’origine immigrée ou binational, c’est plutôt l’égalitarisme ou même un certain internationalisme qui conduisent à voter à gauche. On n’a pas de raison d’aimer plus particulièrement la France que n’importe quel autre pays, si je suis d’origine algérienne il est bien naturel que je fantasme mon origine arabe et que le sort du peuple palestinien, par exemple, me conduise à voter LFI. Ou alors je suis un travailleur « précaire », j’ai une conscience de classe et je vois bien que mon ennemi c’est la finance internationale, que le capital soit français ne me le fera pas plus aimer. Je voterai à gauche parce que je déteste le capitalisme français qui refuse d’indexer mon salaire sur l’inflation.

      J’ai l’impression que l’argument patriotique sert surtout de brouillage politique généralisé. Il faudrait avoir une caution de droite pour défendre des positions de gauche, ce qui est absurde. Ainsi, un peu comme tu le fais avec Leclerc, des mouvements antiracistes utilisent la présence de soldats issus des anciennes colonies lors de la Libération pour valoriser la présence maghrébine en France, mais l’existence de tirailleurs africains dans l’armée française est un argument en faveur de l’impérialisme colonial, pas un argument contre les discriminations. Le maréchal Leclerc de Hautecloque est un héros de l’imaginaire catho, nationaliste et militariste, pas gauchiste.

      Concernant d’éventuelles collusions avec des régimes comme la dictature russe, si celles-ci servent l' »intérêt bien compris » de la France, (de ses entreprises) où est le problème ? D’un point de vue patriotique, la France doit soutenir des régimes « amis » même s’ils sont les pires du monde. C’est seulement un universalisme de la liberté ou de l’égalité qui peut conduire à refuser de telles collusions. C’est le souci de ce qui arrive à des peuples étrangers comme le peuple russe ou le peuple palestinien qui peut conduire à voter contre la realpolitik de droite conservatrice et libérale.

      Dire aux gens : vous avez des valeurs de droite, votez à gauche, paraît confus, sauf si on s’adresse à des gens particulièrement retors, ou si on méprise assez le peuple en cherchant à le séduire avec des arguments qui flattent ses sentiments supposés au détriment de sa raison. Croire que si on plonge les gens dans la confusion, ils vont peut être voter pour nous, sur un malentendu, paraît assez hasardeux, même si ça marche.

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      1. Tu t’es droitisé mon bon Ben. Moi qui suis plutôt de droite, mais dans le cadre d’une république modérée, je trouve ton commentaire bien radical. Le général Leclerc est une grande figure de patriote dont le parcours commence à l’extrême droite et termine dans un beau christianisme républicain.
        Un républicain, de droite comme de gauche, rejette les privilèges, ceux de la noblesse d’ancien régime comme ceux des milliardaires d’aujourd’hui. Lutter contre ces privilèges n’est que républicain, or il n’y a que le programme de la gauche que l’on trouve ce combat. Du coup, ceux qui sont de droite, et qui en plus aiment la France, devaient voter pour avoir quelque temps un gouvernement de gauche.
        En 1936, ceux qui aimaient la France ont déjà voté pour le Front populaire. Et depuis, même les traitres à la patrie que sont les racistes actuels et leur soutiens richissimes, ne font rien pour empêcher les pauvres d’avoir des congés payés. Ils savent tous que revenir sur les acquis sociaux seraient vus comme hostiles aux Français.

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  2. On suivra tes préconisations à la lettre, cher sage précaire. Si on le peut. Car dans notre circonscription, il faudra encore assumer le député macroniste sortant. On ne lâche pas le pouvoir comme ça…

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