« Inside Britain’s Israel Lobby »: un documentaire de Channel 4

 

Écrit par Peter Oborne, le documentaire Dispatches: Inside Britain’s Israel Lobby serait impossible en France, où le sujet est trop sensible, et où les journalistes (ceux qui les emploient, plutôt) ont moins de courage, ou moins d’indépendance. Je l’ai regardé par hasard, moi qui regarde peu la télévision. Très vite, dès les premiers mots du documentaire, j’ai été bluffé par la liberté de parole du journaliste anglais.

Il explique comment un lobby appelé « Friends of Israel » finance des politiciens des principaux partis politiques britanniques. Le leader des conservateurs (et probable prochain premier ministre) David Cameron, est actuellement arrosé d’argent pour sa campagne, ce qui l’a amené à ne jamais prononcer le mot « Gaza » dans ses discours sur le Moyen-Orient. Dix millions de livres sterling auraient été versées au parti conservateur par les « Amis d’Israel » durant les huit dernières années. Un politicien, M.Hague, bénéficiait de dons venus des membres de ce groupe de pression, et quand il se permit, lors de l’intervention israélienne à Gaza, de dire que c’était là une « riposte disproportionnée », des membres de l’organisation le traitèrent d’antisémite et tous les fonds lui furent supprimés.

En général, les journalistes du Guardian et de la BBC se font régulièrement traités d’antisémites, et le documentaire Dispatches montre de nombreux journalistes fatigués de devoir se battre constamment pour travailler en supportant la pression.

La pression est aussi très lourde sur les épaules d’autres juifs britanniques qui protestent contre les méthodes du lobby en question. L’un d’eux dénonce le fait que les Friends of Israël prétendent représenter tous les juifs, moyennant quoi il s’est fait traiter de nazi dans des journaux américains. Un autre est en charge de la Liberal Synagogue (« Synagogue de gauche »), et dénonce clairement, calmement, les excès de l’État d’Israël. Il rit de la pression que les Friends of Israël font peser sur lui. Il dit que c’est la vie, et qu’il faut faire avec. Visage de sain et regard sans révolte.

Le reportage est conduit de main de maître et laisse deux sentiments également puissants. Premièrement, on se dit que les militants pro-Israël fatiguent de plus en plus de monde et font de plus en plus de mal à l’image du pays qu’ils veulent défendre. Deuxièmement, on se prend à admirer les juifs dans leur ensemble pour leur diversité d’opinions et leur capacité à critiquer frontalement, courageusement, les extrémistes de leur propre communauté.