Chantier, phase 3

Cela fait des années que mon frère a peur de s’attaquer à ce mur. Depuis que la fenêtre a été percée, il y a dix ans, l’équilibre des pierres est devenu précaire. Pour bien faire, il faut faire tomber tout ce qui tombe, afin de reconstruire de manière saine. Cela, évidemment, est l’objet de toutes les craintes : et si le mur tout entier s’écroulait ? Si la maison dans son entier ne résistait pas et tombait à terre, pan par pan ?

C’est la phase 3 du chantier.

La mise au point du mur « du dehors ». Ce mur est celui que l’on voit depuis la terrasse principale, c’est celui qui est percé d’une fenêtre et celui qui soutient la charpente, donc il faut le soigner. Nous devons réussir notre coup sur le plan esthétique et sur le plan de la solidité.

Il faut savoir qu’en Cévennes, les murs sont construits en deux couches. Entre les deux couches de pierres, des gros graviers. Ici et là, à je ne sais quelle fréquence, des pierres plus longues (les « solisses », je ne garantis pas l’orthographe, c’est peut-être un mot occitan, et peut-être même un peu inventé par mon frère) font toute la profondeur du mur. A part ces « solisses », l’intérieur et l’extérieur du mur sont indépendants l’un de l’autre.

Mon frère progresse à vue d’œil en maçonnerie. C’est impressionnant, il produit maintenant des gaches de grande qualité, plus onctueuses et plus résistantes, et pourtant constitué de plus de sable qu’auparavant. Il monte les pierres avec plus d’assurance et de vitesse, et il a aiguisé son œil.

Les premières phases du chantier l’ont mis en forme, en jambe, en confiance. Il met quelques étais contre le mur pour éviter que tout s’écroule, et il fait tomber les pierres branlantes. Seule la partie intérieure du mur tombe. Puis il remonte la partie écroulée avec une aisance qu’il n’aurait jamais eu il y a un mois.

En deux jours et des boulettes, l’affaire est torchée.

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