California in my mind

Je ne sais pas pourquoi mon cœur se serre si fort quand des images me viennent de la Californie. Je repense souvent à mon petit séjour là-bas avec une intense nostalgie. Un sentiment proche du désespoir. Que ce soit Los Angeles, son centre ville ou sa lointaine banlieue, San Francisco ou Oakland, que ce soit des paysages ruraux ou des ambiances urbaines, toute la Californie me revient en mémoire comme un paradis perdu.

Comment cela est-il possible ? Certes, j’y ai rencontré et retrouvé des personnes formidables. Les Californiens d’adoption ont été généreux avec moi, hospitaliers, stimulants, intéressants, et il n’est pas étonnant que j’en garde un bon souvenir. Mais ce n’est pas ça. Non, ce n’est pas suffisant. Des gens sympas et intelligents, j’en rencontre partout, je les attire, comme la fleur attire les abeilles. Comme le sombre lac attire les baigneuses. Comme le mont pelé attire les randonneurs. Je peux en faire à la pelle, des images de ce calibre. Comme la vieille fontaine attire les juments…

Il y a autre chose, quelque chose de mystérieux et de caché, qui fait de la Californie un lieu de ma mémoire particulier, lumineux et bouleversant. Tous les matins, j’étais angoissé. Des crises de panique me sautaient à la gorge et je voulais en finir. Ma vie ne valait plus rien, je voulais mourir. Avec le recul, on m’a dit que j’étais sous le coup d’une dépression due à la mort imminente de mon père. Je faisais mon deuil avant la mort.

Ces angoisses dans une région magnifique ont créé un stock d’images et d’émotions, en moi, qui se sont cristallisées en souvenirs fulgurants, éclatants. Ce furent des épiphanies à répétition, qui se sont succédé comme une réaction en chaîne, et qui, emprisonnées dans la cage de ma mémoire, sont devenues une pure splendeur.

Enfin, il y a une dernière chose. J’ai beau retourner les idées dans tous les sens, j’ai le sentiment tenace que les gens qui habitent en Californie sont les plus chanceux du monde. Ils me font l’effet d’être privilégiés sur la terre. Je n’avais jamais eu ce sentiment avant, dans aucun autre pays du monde. Partout, j’étais émerveillé, mais je percevais quand même les côtés négatifs. Là, sur la côte ouest des Etats-Unis, je crois avoir vu l’endroit le plus heureux du monde, le plus parfait.

Le sage précaire finira peut-être sa vie là-bas, en immigré clandestin. Il construira une cabane et se rendra parfois, deux fois l’an, à des dîners en ville avec des intellectuels de Berkeley ou des poètes d’Albany. Il vivra de peu, dans la sagesse toute relative de son âme inquiète, et dans la tiédeur des grains de raisin qu’il picorera en attendant d’être expulsé comme un vulgaire chicano.

2 commentaires sur “California in my mind

    1. C’est vrai, et je n’ai goûté à aucun vin pendant les semaines que j’ai passées là-bas. Il me semble que ce n’est pas une boisson aussi populaire, en Californie, que le pot de côte ou le beaujolais le sont à Lyon.

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