Liverpool est la ville des Beatles et du Liverpool Football Club. C’est assez dire.
Rien ne remue davantage les masses occidentales que les clubs de football et les groupes de variété légendaires.
Ce que j’aime dans la culture populaire, c’est la démesure qui lui colle à la peau. Les fans des Beatles parlent souvent de « génie », de « création », de « légende ». Et le grand patron de Liverpool FC, Bill Shankly, déclara, un jour d’émotion : « Certains pensent que le football est une question de vie ou de mort ; je vous le dis, c’est beaucoup, beaucoup plus important que ça. »
Aller au stade d’Anfield est sincèrement émouvant. Un stade construit au milieu des maisons ouvrières, à l’apparence plutôt modeste, entouré de pubs passablement moisis et boisés. Un musée raconte l’histoire du XXe siècle sous l’angle du club, que des fans du monde entier viennent visiter.
Des histoires de victoires, de héros, de morts, de passion morbide et de trophées.
Un guide à l’accent scouse extraordinaire nous emmène dans le stade lui-même et nous berce de la grande geste footballistique. Ils diffusent la chanson que le public chante à chaque match : You’ll Never Walk Alone. Le public de Liverpool incarne avec fierté le soutien sans faille à son équipe. Le public de Liverpool incarne la fidélité. Dans l’esprit des mecs de Liverpool, être un supporter est plus qu’un honneur, c’est avoir une influence certaine sur le cours des événements. Il est de notoriété qu’ils ont fait gagner leur équipe des matches essentiels, qu’ils ont influencé des arbitres, qu’ils ont intimidé des équipes adverses.
Pendant que le guide nous parle, des filles vont même ramasser de la pelouse coupée, afin que les pèlerins puissent ramener une poignée de la précieuse matière chez eux.
Liverpool, c’est la passion à l’état pur.
J’aime bien tes photos, elles me font penser au nouveau quartier de Perrache, enfin, la Confluence, au Sud du centre d’échanges. On a construit des immeubles cossus, creusé un port, avec une darse -mais je ne suis plus bien sûre maintenant de ce que veut dire le mot « darse ». Mais à Lyon, c’est quand même la brique rouge qui manque, nom d’un rat !
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C’est magnifique, merci de nous faire rêver et voyager…
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Bonjour Guillaume,
« La passion à l’état pure » c’est pas un peu contradictoire passion et état pur, même si c’est une expression qu’on utilise, ce qui est passion finirat par se consumer et ce qui est pur est déjà au-delà de cet état là, non ? Je ne sais pas ces deux mots l’un à côté de l’autre sont récurrent et le thème de tellement de livres, c’est comme si on se trompait de sujet ou c’est moi qui me trompe ou celà dépend peut-être de ce que l’on est à la lecture du livre. Oui rien n’empêche quelqu’un de se tromper, un même livre lu à différents âges n’a pas le même sens du coup on est libre d’y voir autre chose. J’ai encore du sauter des étapes dans le raisonement, après tout c’est peut-être la meuilleure des coses qui puisse nous arriver la passion à l’état pur ! Sacré programme en même temps faut être déjà stable pour arriver à ça.
Liverpool dis comme çà c’est plus que vital alors c’est « et sens ciel » , freedom liverpool. Merci.
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Je viens de voir que j’ai oublié l’essentiel, tes billets sont suffisement ouvert pour que l’on puisse partager et mes commentaires sont suffisement fermés sur moi, alors que je pensais ouvrir ou écrire pûtôt! Pfff…… Comment fais-tu pour te « détacher » de tes écrits et les donner à vivre ? Allez dans-avec une idée sans se perdre dans son ressenti. Merci Guillaume.
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Je ne crois pas que la passion soit en contradiction avec la pureté. Elle est contradictoire avec le bonheur, d’accord, avec la joie, avec la raison et même avec la délectation. Mais certainement pas avec une pureté qui confine à la folie, au crime passionnel, aux dérèglements de toute sorte.
Liverpool, ce sont les fans qui crient lorsque les Beatles chantent. Il faut le faire, crier en même temps que ceux que l’on adule chantent. Ca revient à éteindre l’objet de son amour sous l’expression de son amour pour lui. J’aime tellement que je détruis ce que j’aime. Hegel faisait de cela, si je ne m’abuse, la structure dialectique du désir…
Les supporter de Liverpool FC qui ont causé le désastre du Heysel dans les années 80 (des dizaines de morts parmi les supporter italiens) avaient une envie folle d’étreindre les joueurs, et le manager, et le stade, et le club tout entier, mais ils ne le pouvaient pas, alors ils ont réorienté leur amour-passion sur leurs adversaires. Crime passionnel. Amour trop grand pour pouvoir être satisfait, et qui se déverse dans la pureté de la destruction.
Le hooliganisme, c’est la recherche de la jouissance dans la pureté du mal, c’est donc l’extrême du rock’n’roll.
Et John Lennon, n’a-t-il pas été tué par un homme rendu fou d’amour ?
Incandescence de Liverpool.
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A propos de culture, tu ne parles pas de ce que tu es allé faire à Liverpool. Les écrivains voyageurs entre la Mandchourie occidentale et le Tibet oriental, ça a marché ?
Sinon, moi, je ne suis pas d’accord avec l’association passion-pureté-destruction. Il n’y a pas d »‘amour trop grand pour pouvoir être satisfait, qui se déverse dans la pureté de la destruction. » Ce qu’il y a, à mon avis, dans la passion est plus positif. Staisfaction ou insatisfaction sont contingents dans la relation à l’objet ; or;, comme chacun sait, la frustration entraîne la violence, mais son rapport à la passion n’est pas nécessaire.
La passion, c’est l’affection qui résulte de la relation à l’infini qu’enveloppe son objet, « l’infini à la portée des caniches », comme disait Céline ; c’est-à-dire la seule idée adéquate qu’on puisse avoir d’un objet fini sous le mode de la pensée, idée infinie que pourrait avoir un dieu d’un objet fini qui, en tant qu’il est lui-même doué d’une âme, peut exprimer l’infini. Quoi de plus positif.
Quant au hooliganisme, il s’agit juste d’une forme aigue de connerie footballistique, rien de plus naturel.
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C’est une discussion qui n’a pas de fin, really : tu dis brillamment « la frustration entraîne la violence, mais son rapport à la passion n’est pas nécessaire. » Mais je crois que la frustration est consubstantielle à la passion, et la théroie de Denis de Rougemont va dans ce sens, comme on l’a rappelé dans la discussion de mon billet « De la passion amoureuse » http://laprecaritedusage.blog.lemonde.fr/2008/12/05/da-la-passion-amoureuse/
Ta théorie sur l’infini est belle, mais je ne vois pas bien comment elle peut rendre compte de la déraison et du désordre qui accompagnent la passion.
Ta dernière pique sur le hooliganisme est une vaine tentative de désolidariser le football et la musique. Liverpool est le lieu au monde où le football et la musique montrent leur indissociabilité. En un mot, je comprends qu’on n’aime pas le foot, mais je ne comprends pas qu’on méprise le football et qu’on prenne le rock au sérieux.
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Tu avais écrit cela à cette époque, dans la discussion sur la passion amoureuse : « Vous n’avez pas besoin de frustration pour avoir la passion, vous avez besoin de perte et de désappropriation. »
Il me semble que c’est le contraire. Le sage précaire par exemple, quand il se rend bien compte qu’il a tout perdu, et que l’objet de son amour ne lui appartient pas, n’a plus de passion.
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J’ai relu cet échange de décembre 2008. C’était dense et nerveux. On était en forme.
Sur la passion amoureuse, je me souviens d’un film de Lynch, dans lequel une des soeurs Arquette subit un pratique sexuelle déviante par derrière, ça doit se passer sur le capot de la Ford Mustang, ou dans la lumière des phares, tout en affirmant à son partenaire, d’une voix d’outre-tombe : « You will never have me… You will never have me… » et le type s’efforce pourtant, mais ne réussit pas, ça lui échappe.
D’où vient ce désordre ? il vient de l’errance. On ne peut pas se trouver face à quelque chose d’infini comme la surface de la peau de la fille qu’on aime, et garder ses repères, laisser chacune de nos réactions à se place comme dans un ordre raisonnable des affects. Mais le désordre et la déraison ne sont pas pour autant négatifs, ils sont une sorte d’hommage maladroit mais adéquat de la raison à l’infini en actes de la passion amoureuse.
Mais ça nous éloigne du FC Liverpool et des Beatles. Qu’on ne vienne pas me dire qu’il y a la « passion du ballon rond », qu’il y a une âme dans un joueur de foot, ou que John et Yoko étaient la réincarnation de Tristan et Yseult. Je vomis indissociablement les deux.
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Une ville effectivement fantastique. Rien à dire
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