Elle vient de sortir de chez moi, elle m’a versé un mois de loyer et l’argent pour les factures de gaz et d’électricité. Elle est venue sans apporter le moindre bagage et est repartie faire la fête avec ses amies espagnols. Une jolie Brésilienne métis, au visage rond mais au corps élancé, habillé de noir, bottes et fourrure.
Elle a besoin d’une chambre uniquement pour ses weekends, car elle travaille sur un bateau toute la semaine. Un bateau de luxe, dans lequel elle s’occupe du Spa. Des clients prennent ce bateau uniquement pour se faire masser par ma nouvelle colocataire.
Elle nous a annoncé tout de go qu’elle était en instance de divorce, mais son mari continue de la conduire, de la servir. C’est lui qui l’aidera à déménager ses affaires dans ma maison.
Jamais je n’aurai autant rencontré de Brésiliens que lors de mon séjour à Belfast. Est-ce le signe de l’émergence du Brésil sur la scène internationale ?
Outre ces questions d’argent, elle est venue pour me demander quelles étaient « les règles de la maison ». Les règles ? Je n’ai pas su que lui répondre. Ici, il n’y pas d’autres règles que celle de respecter le sommeil et la vie privée des autres. Même pour le ménage, regardons les choses en face : tout le monde fait ce qu’il veut et au bout du compte, grosso modo, c’est moi qui me tape un peu tout. J’espère qu’elle n’a pas été trop déçue.
Elle dit qu’elle aime beaucoup danser, en particulier la salsa, le jeudi soir à La Boca. C’est drôle, nous y étions nous-mêmes avant noël! On a dû s’y croiser. Elle chante aussi, des chansons brésiliennes accompagnée d’un compatriote guitariste. Je lui dis que les Français sont des grands admirateurs de Chico Buarque, surtout grâce à O que será que será mais aussi – pour ceux de ma génération – pour la superbe chanson qui accompagnait une publicité sensuelle qui m’a beaucoup fait rêver : Essa moça tá diferente. Gamin, je me disais que c’était impensable que des filles soient si belles, et invraisemblable que des chansons soient si érotiques. Depuis, j’ai bien essayé d’apprendre la samba ou la bossa nova à la guitare, mais en pure perte.
Je lui dis que mon amie brésilienne, Alinne, m’a fait découvrir il y a quelques années une chanteuse qui, paraît-il, n’est pas si populaire que cela : Marisa Monte. Ma colocataire en chante volontiers. Elle est surprise que je la connaisse et m’avoue qu’une de ses chansons est en réalité sa préférée, la meilleure de celles qu’elle interprète avec son guitariste. Laisse-moi deviner! C’est une chanson très triste, qui parle d’une source d’eau que l’on peut boire à l’aube pour effacer ses douleurs. Oui, c’est plus ou moins ça, dit-elle dans un sourire africain. Je cherche le titre, ça parle de « désillusion » : Dança da solidão.
C’est aussi ma chanson américaine préférée, mais je ne suis pas une référence en la matière, alors je me tais.
Elle part rejoindre ses joyeux amis, mais avant, une cliente lui offre cent livres sterling pour un massage, et elle vient la chercher en voiture jusque dans mon quartier malfamé.
Je sens ton côté ethnographe bien stimulé par cette nouvelle rencontre…
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Tu me connais bien, Cochonfucius. Et qui sait si un jour, contre toute attente, l’ethnologue précaire et gauche ne sera pas capable de bouger son cul, lui aussi, aux rythmes endiablés des cuivres brésiliens ?
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Elle est elle…
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Un « sourire africain »?
En tout cas, c’est une belle expression.
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»Jamais je n’aurai autant rencontré de Brésiliens que lors de mon séjour à Belfast. Est-ce le signe de l’émergence du Brésil sur la scène internationale ? »
Sollers dans 1 de ses bouquins avait déjà prédit cela mais je ne me souviens plus du titre – fais gaffe que ce soit pas 1 travelo –
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« … faire la fête avec ses amies espagnols. Une jolie Brésilienne métis, au visage rond mais au corps élancé, habillé de noir, … » L’orthographe aussi est en pleine érection (chez un professionnel de l’écrit, ça signifie quelque chose): amiEs espagnols, elle est métis| ; c’est son corps qui est habillé, pas elle.
A part ça, les Brésiliens sont prêts à tout, comme leurs ancêtres Portugais et Indiens qui traversaient les grands espaces rien que pour voir si c’était mieux au-delà. Au temps où je sévissais dans le service informatique, j’avais vu débarquer plusieurs collègues Brésiliennes. Pourquoi venir en France ? pour voir, et repartir après. Elles avaient tout liquidé là-bas, sûres de retrouver quelque chose si l’idée leur venait de retourner chez elles. Ca fait longtemps que le Brésil a émergé.
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Cordialement
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